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Hockey sur glace - Ligue Magnus
CLUB KHL EN FRANCE : FANTASME OU RÉALITÉ ?
 
Verra-t-on un jour un club français de hockey sur glace évoluer dans le championnat européen de la KHL ? Tristan Alric, créateur de la Coupe Magnus, explique la complexité d’un tel projet, qui serait certes très valorisant, mais qui nécessiterait des infrastructures et des moyens financiers que notre sport n’a pas les moyens de s’offrir pour l’instant.
 
Média Sports Loisirs, Hockey Hebdo Tristan Alric le 15/10/2021 à 11:30
Tribune N°37

 
-  CLUB KHL EN FRANCE : FANTASME OU RÉALITÉ ? -

Des rumeurs persistantes ont circulé ces dernières années évoquant la possibilité d’assister prochainement à la création d’un club professionnel de la KHL en France. Ces bruits, qui relèvent selon moi plus du fantasme que de la réalité, sont nés du fait que des hauts dirigeants de la « Ligue Continentale de Hockey » (créée en 2008), ont effectivement évoqué publiquement cette possibilité. Ce fut le cas notamment de Dimitri Tchernychenko, président du conseil d’administration de la ligue. Mais aussi de Valery Kamensky l'ancienne vedette de hockey soviétique également membre de ce conseil.
 
Photo hockey Ligue Magnus - Ligue Magnus - CLUB KHL EN FRANCE : FANTASME OU RÉALITÉ ?
Photo KHL
Stéphane Da Costa - L'Avtomobilist
A la fin du mois de janvier 2019, lors d’un All-star Game organisé dans la ville russe de Kazan, Stéphane Da Costa, renfort tricolore du Avtomobilist Ekaterinbourg, n’était pas le seul français convié à cet événement. Dans les tribunes, pour assister à ce match de prestige, se trouvaient également Luc Tardif, président de la FFHG, ainsi qu’une délégation représentant l’AccorHotels Arena, l’ex-Bercy, qui avait déjà accueilli les championnats du monde de hockey en 2017.
Si certains y voyaient la confirmation de l’engagement prochain d’un club français en KHL, le président Tardif s’est empressé de rappeler à l’agence russe Tass « qu’il n’y avait, pour l’instant, rien de bien sérieux concernant ce projet ». La délégation française a juste fait savoir que, certes, elle y pensait et elle y travaillait, en privilégiant dans cette pure hypothèse la ville de Paris plutôt que celle de Marseille (dixit Tardif), mais que ce n’était pas encore à l’ordre du jour… En d’autres termes, les dirigeants français se sont dit « flattés qu’on pense à leur pays » mais ils ne voulaient surtout pas s’emballer trop vite et ils étaient, pour dire la vérité, très sceptiques…
 
Rappelons que parmi les 24 équipes qui disputent actuellement le championnat de la KHL, il y a six pays différents en compétition mais avec une très grande prédominance de la Russie qui est représentée à elle seule par 19 clubs au total puisque la KHL a remplacé la Super Liga de ce pays. Les autres nations, minoritaires, sont : la Lettonie (1 club), la Finlande (1 club), la Biélorussie (1 club), le Kazakhstan (1 club) et la Chine (1 club).
Si je suis très sceptique concernant l’arrivée d’un club français dans la KHL, c’est qu’il faut déjà savoir que son coût de financier est très important et que les difficultés économiques n’ont pas épargné ce nouveau circuit qui se veut être le concurrent de la NHL sur le vieux continent. C’est ainsi que neuf clubs ont déjà dû se retirer de ce circuit professionnel depuis sa création. Par ailleurs, le gouvernement russe pouvant modifier les règlements de la KHL au gré de ses envies, il a déjà obligé subitement des joueurs étrangers à quitter leurs équipes, et l'instabilité financière a entraîné souvent des suspensions de salaires.
 
Mais même dans l’hypothèse où la KHL puisse garantir désormais une plus grande stabilité, d’autres questions importantes se posent concernant le contexte particulier du hockey sur glace français dont le système économique est déjà fragile. Sur le site Hockey Hebdo Philippe Rouinssard disait déjà avec justesse en 2014 : « Avec la rénovation de Bercy, la patinoire est toute trouvée. Mais il manque évidemment le nerf de la guerre, c’est à dire de l'argent ! Les Qataris seraient-ils intéressés pour racheter les Français Volants ? ».
 
Un internaute passionné de hockey a réagi à son article en disant avec lucidité : « Une équipe de KHL à Bercy ? Je n’y crois pas beaucoup car cela voudrait dire environ une trentaine de soirées (sans play-offs) occupées par le hockey dans une ville qui peut sûrement remplir Bercy pour du hockey sur glace, mais seulement une fois par an à l’occasion de la finale de la Coupe de France. Tout au long de l'année, ça me parait moins réaliste vu que Bercy est loué par de nombreux événements très lucratifs notamment des grands concerts. En tout cas, si ça se fait, je ferai sûrement partie des plus assidus ! »
 
Il faut savoir par ailleurs que dans le championnat professionnel de la KHL, si le club le plus proche de la France est celui du Dynamo de Minsk en Biélorussie (2120 kilomètres), il y a également le très lointain club russe de Vladivostok, une ville située aux antipodes, à proximité de la frontière avec la Chine. Le club du HK Vladivostok se trouve donc situé au terminus du train Transsibérien qui permet de rejoindre Moscou en…sept jours. En d’autres termes, la ville de Paris est distante de 11 850 kilomètres et séparée par neuf fuseaux horaires ! Alors, bien sûr, la KHL est divisée au départ en deux conférences (Ouest et Est), mais les trajets sont déjà très longs et éprouvants, toutefois pour disputer les séries finales, bonjour les déplacements, même en avion !
 
Ce fantasme de créer un grand club international de hockey sur glace en France me rappelle un épisode mémorable qui s’est déjà produit en 1990. A cette époque, le canadien Robert Millette, qui était l’entraîneur du club de Tours, s’attira les foudres des membres du club de Lyon (dont il fut le coach auparavant) en faisant partie d’un projet étonnant qui prévoyait la création à l’échelle mondiale d’une nouvelle ligue de hockey professionnelle qui devait prendre le nom de Global Hockey League (GHL). Malgré son départ de Lyon et ses antécédents controversés au CPL, Robert Millette n’hésita pas à proposer que son ancien club rhodanien fasse partie de ce grand projet. Peut-être pour se faire pardonner…
 
Parmi les six grandes métropoles européennes qui furent inscrites dans ce nouveau championnat très ambitieux, qui voulait concurrencer la NHL, se trouvait donc la ville française de Lyon. Or, Rodney Gibson, un gros agent immobilier de Toronto, qui s’était autoproclamé le propriétaire de la « franchise » française, fit savoir qu’il avait choisi Robert Millette comme directeur sportif… Dans un premier temps, les dirigeants du Club des Patineurs Lyonnais acceptèrent la proposition alléchante faite par la nouvelle ligue internationale GHL d’héberger l’une de ses équipes dans la patinoire Charlemagne.
 
Du coup, le club local du CPL ne pouvait plus être réengagé dans le championnat de France de la Nationale 1B ce qui provoqua une très vive réaction des hockeyeurs lyonnais qui se retrouvèrent à la rue du jour au lendemain. Le capitaine Luc Marchand et ses coéquipiers demandèrent alors une entrevue à Christian Bonnefond, l’adjoint aux sports de Lyon, puisque la ville, flattée d’avoir été choisie, était partie prenante de l’adhésion à la Global Hockey League.  Mais cette réunion fut inutile puisque moins de quinze jours après l’annonce tapageuse de l’implantation d’une équipe professionnelle à Lyon, les dirigeants de la GHL ne répondirent plus et le projet tomba à l’eau…
 
Alors, l’éventualité d’un club de la KHL en France relève-t-elle à nouveau du simple fantasme ou est-elle vraiment réaliste ? Cette fois l’interlocuteur, à savoir la Ligue Continentale de Hockey (KHL est son acronyme en russe), est certes plus crédible que l’éphémère GHL et a déjà un passé sportif. Je demande donc à voir ! Bien sûr, avec l’arrivée miraculeuse d’un très riche mécène en France, prêt à investir massivement des millions d’euros pour le hockey sur glace, tout serait possible, mais faut pas trop rêver !
 
Dans une récente interview, l’entraîneur national Philippe Bozon déclarait à ce sujet : « Ce serait une bonne chose pour pouvoir regrouper en France nos meilleurs internationaux dans un championnat de haut niveau ». Certes, mais il faut être réaliste, cette éventualité reste très improbable. Pourtant, un club français de la KHL d’un niveau international très médiatisé à Paris ou dans une autre grande ville comme Lyon, ou Marseille, serait de toute évidence un très bon moyen d’attirer à nouveau l’attention des médias. Il rendrait le hockey sur glace plus spectaculaire et sérieux aux yeux de la presse française. Mais je le répète, un club de KHL en France relève selon moi plus du fantasme que de la réalité.
 
Pour information, le budget minimum nécessaire pour créer un club (modeste) de KHL c’est 30 millions d’euros ! Pour prendre des exemples, celui du Dynamo de Moscou est de 50 millions, celui de Kazan 80 millions, quant au CSKA de Moscou et celui de St Pétersbourg, leurs budgets s’élèvent à 100 millions...
Par ailleurs, connaissez-vous une patinoire dans notre pays assez grande et qui soit capable d’organiser une trentaine de matches de hockey dans une saison avec 10 000 spectateurs à chaque fois (au minimum) pour que ce soit rentable ? Connaissez-vous également quelqu’un qui prenne le risque fou de soutenir financièrement un projet aussi onéreux et aussi hasardeux dans notre pays où le hockey sur glace est un sport mineur ? Je vous laisse répondre à ces questions ! Ce n’est pas sans raison si plusieurs grandes villes européennes, comme Londres et Milan, ont renoncé à se lancer dans l’aventure de la KHL. Mais bon, il n’est pas interdit de rêver un peu…
 
Pour l’instant, on se contente donc de suivre avec attention le parcours de quelques internationaux français qui sont devenus des renforts étrangers dans la KHL comme ce fut momentanément le cas de trois d’entre eux : Damien Fleury à L’étoile rouge de Kunlun, Charles Bertrand au Sibir Novossibirsk et Yohann Auvitu au Hong Kong Sotchi. Mais surtout celui de Stéphane Da Costa qui reste à ce jour notre seul représentant dans la KHL et qui joua successivement au CSKA Moscou, Automobilist Ekaterinbourg, Lokomotiv Iaroslavl, Ak Bars Kazan avant de retourner cette saison en Sibérie occidentale au club Automobilist Ekaterinbourg.
 

 


Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique.
 
 
 
 
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Réactions sur l'article
 
sam ouraille a écritle 15/10/2021 à 16:48  
Effectivement on peut rêver un peu, pour résumer
la KHL c'est plutôt du domaine de l'onirisme actuellement et les difficultés financières et le peu d'engouement des médias pour le hockey sur glace Français du domaine de la réalité!
A moins que la nouvelle direction de la FFHG détienne la clé de la renaissance du hockey national. C'est pas gagné encore !
 
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