Le championnat de D1 2014-2015 s’est achevé sur le sacre attendu de Bordeaux. Les Boxers évolueront donc la saison prochaine en ligue Magnus. Une ligue Magnus qui s’apprête à subir de profondes évolutions qui, par un effet boule de neige, toucheront les divisions inférieures.
Et donc la D1, une division qui a beaucoup évolué au cours des dernières saisons. Les clubs se sont professionnalisés, les matches ont gagné en intensité, le niveau de jeu est en constante progression. Cette évolution ne s’est pas accompagnée d’une modification en profondeur de la formule du championnat.
Tout au long de la saison, Hockey Hebdo a côtoyé les acteurs de la D1 et nous avons demandé à certains d’entre eux de nous dessiner leur championnat idéal. Formule, nombre de matches, arbitrage, ils nous livrent leurs réflexions.
2014-2015 – un rythme tronqué
«
Ne pas trouver une 14ème équipe pour jouer en D1, ce n’est pas un bon signe pour le hockey français »,
Stan Sutor, le coach des Aigles de Nice, résume la pensée de la très grande majorité de ses confrères. Villard reversé en D2, Brest maintenu en Magnus, la saison de D1 s’est donc déroulée à 13 clubs. Avec une équipe exempte à chaque journée, c’est tout le rythme déjà peu intense du championnat qui s’en est trouvé tronqué. Si l’on y ajoute les problèmes de patinoires à Mulhouse et Reims, les indisponibilités régulières de Mériadeck et le drame de Dunkerque, c’est tout le calendrier qui s’en est trouvé bouleversé.
Difficile pour certaines équipes de trouver leur rythme de croisière avec des séquences de 3 semaines sans match ou d’enchaîner avec parfois jusqu’à 3 matches dans la même semaine pour rattraper le retard. Autre conséquence, le classement a longtemps été illisible, aucune équipe n’ayant joué le même nombre de matches.
Difficile de blâmer qui que ce soit pour la succession d’évènements qui a conduit à cette situation, mais elle explique certainement le sentiment partagé par de nombreux entraîneurs : ce championnat manque de rythme et de matches
Augmenter le nombre de matches
Une saison à 24 matches en 6 mois, c’est trop peu pour la plupart de nos interlocuteurs. Pour
Frank Spinozzi, le coach de Neuilly, «
Avec une saison à 24 ou 26 matches, on peine à attirer certains joueurs étrangers. Un joueur est un compétiteur. Six jours d’entraînement pour 1 match, c’est trop long. » Un constat largement partagé, mais avec beaucoup de joueurs encore non professionnels, la solution n’est pas simple à mettre en œuvre, comme le montre l’expérience vécue par
Claude Devèze, le coach de Nantes «
2 matches par semaine pourquoi pas. Mais on a joué un mardi à Anglet cette saison et à Annecy la saison dernière, donc mes joueurs ont dû poser des congés. Jouer un derby le mardi, pourquoi pas, mais il faut que ce soit cohérent. »
Martin Lacroix, le coach des champions 2015, propose une solution intéressante «
On veut que les choses s’améliorent, mais la D1 n’est pas la Magnus, il y a encore beaucoup de joueurs qui ne sont pas professionnels. On veut tous jouer plus de matches, mais il faut tenir compte des contraintes. On pourrait envisager 2 divisions géographiques avec un double aller-retour dans sa division et un simple aller-retour avec l’autre division. Arriver à 36 matches en saison régulière, ce serait l’idéal. » Il est rejoint par
Frank Spinozzi «
on peut penser à une formule avec des poules régionales, ou jouer 2 matches le même weekend contre la même équipe pour limiter les frais de déplacement. » Testée en Pro B par la Ligue Nationale de Basket, une formule intégrant des poules régionales a vite été abandonnée, trop peu lisible et manquant parfois d’équité. Comme quoi, si le constat est partagé, la solution n’est pas simple à mettre en œuvre.
|
Mav 94 |
|
Mais au-delà des contraintes liées à la disponibilité des joueurs, augmenter le nombre de matches, et donc les frais de déplacement ou d’arbitrage résisterait-il à la réalité économique à laquelle sont confrontés les clubs ?
Ibrahim Soubra, le Président des Bisons de Neuilly, nous apporte un éclairage intéressant «
Les entraîneurs veulent plus de matches pour augmenter l’attractivité du championnat. Mais les Présidents de club sont plus partagés et lors des réunions de Présidents, le discours est différent. Tous les clubs n’ont pas les moyens humains et financiers pour absorber plus de matches. C’est notamment le discours de certains clubs qui ont accédé récemment à la D1, même s’ils affichent des ambitions. Il faut savoir que plus de matches c’est un coût supplémentaire en dotation de matériel, en frais de déplacement pour un match à l’extérieur et en frais d’arbitrage pour les matches à domicile. » C’est aussi plus de recettes au niveau de la billetterie mais, là, tous ne sont pas logés à la même enseigne.
Frank Spinozzi : «
Je veux bien comprendre que plus de matches entraîne plus de frais. Mais alors on peut prendre le problème à l’envers et raccourcir la saison. Une saison plus courte, qui commencerait 1 mois plus tard par exemple, c’est plus de densité au niveau des matches et des économies au niveau des dépenses. »
Même si Bordeaux a eu la chance d’être mieux loti que ces adversaires cette saison, son coach reconnaît qu’ «
on fait beaucoup d’entraînements pour peu de matches et les joueurs aiment jouer. Cette saison, on a eu la chance de jouer la Coupe de la Ligue, mais sinon ça peut être long, surtout avec seulement 24 matches.»
Sur ce sujet, le mot de la fin est pour
Claude Devèze «
les coaches devraient être consultés sur la formule. Comme ce n’est pas le cas, Il faut briefer nos Présidents qui, eux, sont réunis par la Fédération, pour qu’ils défendent nos positions. C’est trop facile de se plaindre après coup et de ne rien dire quand on en a l’occasion. Et il faut reconnaître que faire un calendrier c’est forcément compliqué. Surtout compte tenu des distances entre les équipes du championnat »
Réformer les play-offs
Sur ce point, la formule actuelle fait l’unanimité contre elle, même si les évolutions de ces dernières années vont dans le bon sens.
Pour le coach nocéen «
la formule actuelle n’a pas de bon sens. Une série en 3 matches avec le 1er chez le moins bien classé, c’est pénalisant pour celui qui a réalisé une bonne saison régulière. Et je le dis alors que l’an dernier ça nous a bien servi pour mettre la pression sur Anglet. » Une analyse partagée son confrère bordelais «
En play-off, la formule en 2 de 3 est un piège pour le mieux classé, il faut aller vers des séries en 3 de 5 dès le 1er tour et éventuellement une finale en 4 de 7.»
Augmenter le nombre de matches en play-off,
Frank Spinozzi n’y voit que des vertus «
Il faut des séries en 5 ou encore mieux en 7 matches. Ca participe aussi à augmenter le nombre de matches dans la saison. »
La réforme des play-offs est donc un chantier prioritaire pour nos interlocuteurs. La solution qu’ils proposent semble frapper du sceau du bon sens et devrait rapidement trouver un écho favorable.
Réinstaurer le dialogue avec les arbitres
Sujet récurrent de mécontentement, l’arbitrage est au cœur de la réflexion de nos interlocuteurs.
|
Gaëtan Boucheret |
|
Pour
Claude Devèze, il faut « é
changer plus avec les arbitres. Sur certaines séances vidéo, on ne comprend pas les décisions, on aimerait se les faire expliquer pour pouvoir faire de l’éducation auprès de nos joueurs », Frank Spinozzi fait quasiment le même constat «
Il faut plus d’échanges avec les arbitres. On devrait travailler ensemble et en confiance, pas en confrontation comme c’est trop souvent le cas. »
Cohérences des décisions ou des désignations, les sujets d’incompréhension sont nombreux pour les acteurs du championnat et la solution semble donc passer par plus de communication, «
Il faut, propose
Frank Spinozzi, avoir une réunion en début de saison et une avant les play-offs, ça devrait être un minimum. »
Le coach nocéen pense qu’augmenter le nombre de matches bénéficierait également aux arbitres «
Il faut aider les arbitres, ils sont partie intégrante de notre sport. Plus de matches leur permettrait de progresser plus vite. Arbitre à 4 serait aussi un vrai progrès. Et si on trouve que ce n’est pas possible parce qu’il n’y a pas assez d’arbitres, programmons les matches de D1 un autre jour que ceux de Magnus. »
Sur ce sujet toutes les suggestions sont bonnes à prendre pour aider les arbitres à progresser à la même vitesse que le niveau du jeu pratiqué.
Harmoniser les championnats
C’est la base pour
Claude Devèze «
il faut une formule cohérente avec les autres divisions.» Et cette cohérence devrait s’appliquer à tous les niveaux.
SI un grand pas sera fait l’année prochaine sur le nombre de joueurs étrangers (10 sans « quota » par pays) et la date des transferts qui sera alignée sur celle de la Magnus (15 décembre), il reste encore du chemin à faire.
La date de fin des Play-offs est par exemple considérée par beaucoup comme un problème : au moment où le champion de D1 valide sa montée en Magnus, la plupart des clubs de Magnus ont fini leur saison et savent dans quelle division ils évolueront la saison suivante. Ils peuvent donc prendre une longueur d’avance au niveau du recrutement, notamment sur le marché des JFL. Coach des champions 2015, M
artin Lacroix reconnaît que «
c’est un peu complexe car on ne peut rien concrétiser avant d’être sûr de monter. » Mais quand on voit le recrutement des Boxers, on se dit que des solutions existent…
Le coah nantais estime également que «
finir après la Magnus, c’est plus compliqué pour le promu, on peut donc tirer un grand coup de chapeau à Brest qui a su au mois d’août qu’il évoluerait en Magnus. Mais pour ceux qui restent en D1, ce n’est pas un problème. On avance sur notre recrutement bien avant la fin du championnat »
Autre facteur différenciant qui risque d’avoir de plus en plus d’importance, le nombre de matches et le rythme qu’ils permettent d’acquérir. On revient encore sur ce point mais sous un autre angle. Avec une Magnus qui va enfin voir son nombre de matches augmenter, la marche risque d’être encore plus difficile à franchir pour l’équipe qui montera de D1. Et si elle doit passer par un barrage pour monter en Magnus, cela ressemblera à une mission impossible.
On le voit le championnat de D1 est en pleine évolution. Une évolution pas assez rapide pour les joueurs et entraîneurs que nous avons rencontrés. Tous passionnés, ils nous ont livré leurs réflexions qui, loin d’être des critiques, se veulent constructives. Rendre le championnat plus intense, plus lisible, plus passionnant pour les spectateurs et plus « équitable » pour ses acteurs est un souhait partagé par tous. Eric Ropert, Directeur Général de la FFHG, nous a accordé un long entretien au cours duquel il revient sur ces différentes propositions et sur l’avenir de la D1. Retrouvez cette interview dès jeudi sur notre site.