Le bilan de la Division 2, dressé par notre spécialiste nous amène à nous poser réellement la question : Quel avenir pour le hockey français ? Mais surtout quel avenir pour les clubs qui ont contribué à l’écriture l’Histoire du hockey sur glace français ?
Le championnat de Division 2 est clos pour cette saison 2022/23 depuis maintenant le 25 avril dernier et on a assez de recul pour porter des premières constatations et surtout premières réflexions, d’autant qu’elle a été inédite sur bien des points, à commencer par la formation qui l’a emporté.
Le champion de France de Division 2 est donc le tout jeune club de
Vaujany puisqu’il a été créé en 2012, ce qui en fait donc un des plus récents de France. Pour tout dire
les Grizzlys ne sont rentrés véritablement en championnat qu’en 2017 avec une montée directe en D2 lorsqu’ une association s’est faite avec le grand voisin grenoblois et faisant ainsi l’équipe première de
Vaujany ni plus ni moins que l’équipe réserve des Brûleurs de Loup.
Ainsi la station de montagne iséroise, un des partenaires principaux du club doyen grenoblois, fait profiter ce dernier de sa toute récente patinoire (2012) couverte réglementaire.
On fit donc cadeau à ce nouveau venu du parcours éprouvant de la D3 pour l’intégrer directement dans une D2 qui, il faut bien le dire, peinait alors à boucler son quota de 20 clubs. Depuis, sans aucun renforts étrangers (si ce n’est eux-mêmes encore des juniors en formation comme le russe Stepan Kolonin 18 ans), parfois de quelques joueurs d’expériences (Aubin Lamirault les saisons précédentes) mais quasi-exclusivement de jeunes espoirs grenoblois, ces mi-loups-mi-grizzlys feront rapidement leur place dans cette division. Voici donc résumé rapidement la courte mais riche existence de cette organisation qui vient donc de toucher son ‘’bâton de maréchal’’ avec ce titre de champion de D2.
Les conséquences et suites de ce titre ? La décision du bureau directeur de la FFHG a été nette et à l’unanimité : l’association de
Grenoble avec
Vaujany ne permet pas à ce dernier de monter en D1 puisqu’il leur faut un espace d’une division entre leurs deux équipes premières. Décision logique et prévisible vu la dépendance totale de
Vaujany à l’effectif et à la politique de formation voulu du club grenoblois.
Pour autant chapeau bas à la redoutable école grenobloise et ses jeunes espoirs car n’oublions pas que cette performance a été réalisée alors qu’en même temps la grande majorité de ces joueurs ont dû disputer le championnat élite U20 et U17 et dont ils réussiront à remporter les titres ainsi que celui de U15. Tous ne pourront prétendre intégrer la Magnus à plus ou moins brève échéance mais risquent de faire néanmoins le bonheur de pas mal d'autres clubs français, y compris de l'élite.
C’est donc le finaliste,
Meudon, qui va profiter de la promotion en division supérieure avec certainement plus de moyens pour y réussir son intégration, cela d’autant plus que les dirigeants s’y préparaient depuis plusieurs saisons. On sait qu’après 3 saisons de frustration où notablement les résultats ne furent pas à la hauteur de leurs ambitions (ou contrariés par la pandémie lors de la saison 2020/21) les Comètes ont pu décrocher leur graal paradoxalement la saison où ils firent la moins bonne saison régulière depuis 2018/19. Certes ils n’ont pu mettre la cerise sur le gâteau en ne remportant pas la finale – non sans pousser les isérois dans leur dernier retranchement avec une 5
ème manche - mais ils se dotaient bien qu’il n’était guère envisageable d’imaginer une montée de Vaujany, règlementairement impossible.
Néanmoins cet échec pour le titre montre aux Comètes qu’il va falloir se retrousser les manches lors de cette intersaison pour bâtir une équipe capable de rivaliser avec au moins les clubs de 2
ème partie de tableau et ainsi espérer se maintenir en D1. On sait que la marche entre la D2 et la D1 reste haute et que bien des clubs s’en sont aperçus et n’ont fait qu'un va et vient entre les 2 divisions.
Les autres équipes qualifiées pour les phases finales :
Petit coup de chapeau pour
les Coqs de Courbevoie qui ont fait leur meilleure saison régulière depuis bien des saisons et qui, s’ils n’ont pu échapper à l’élimination dès le 1
er tour, au moins ils auront su s’éviter sans peine les angoisses d’une fin de saison délicate avec en prime quelques belles performances à la maison. Il leur reste à savoir mieux voyager.
Tout le contraire pour
Toulouse, brillant finaliste la saison dernière et qui cette fois n’a pu que s’éviter les affres de la poule de maintien. Equipe paradoxale qui peinait l’an dernier à gagner sur sa glace mais étonnement performante à l’extérieur. On l’a retrouvé toujours aussi laborieuse à la maison mais nettement moins brillante loin de ses bases. Le début de saison fut pourtant prometteur mais un énorme passage à vide les feront tomber si bas qu’on put craindre le pire. Ils auront une réaction salutaire pour se mettre à l’abri des Play Downs. Au 1
er tour, ils ne pourront empêcher les Comètes de prendre leur revanche de la saison passée où, contre toute attente, ils les avaient éliminés l’an dernier de la course au titre. Certains départs ne semblent pas avoir été bien remplacés et peut-être est-ce un nouveau cycle à relancer.
Les
Jets d’Evry-Viry sont un peu restés sur leur lancée ou plutôt spirale de la saison dernière. Néanmoins la faiblesse des nordistes de Wasquehal et de la réserve d’Amiens (lorsque celle-ci ne faisait pas jouer ses meilleurs espoirs) leur a permis d’échapper à la poule de maintien mais sans surprise ils ne passeront pas un tour et seront balayés au match retour par Vaujany. A voir si comme leur voisin de Courbevoie, ils sauront réagir la saison prochaine.
Valence, comme d’ailleurs beaucoup d’autres clubs, aura connu un passage à vide ainsi qu’un début de phase régulière un peu laborieux. Mais heureusement quelques performances intéressantes leur ont permis d’assurer la dernière place qualificative pour les play-offs. Ils ne pourront aller plus loin que le 1
er tour.
Les Lynx semblent stagner et on est là aussi probablement sur une sorte de fin de cycle. L’intersaison nous dira peut-être si les ambitions seront revues à la hausse.
Les
Dogs d’Amnéville comme la saison dernière n’ont su faire mieux que la 7
ème place en saison régulière. L’équipe semble donc stagner mais l’effectif étant dans l’ensemble plutôt jeune, il devrait être perfectible. Il faut donc attendre voir si l’intersaison apportera un peu plus de profondeur et d’expérience pour espérer un nouvel élan.
Grosse déception pour
Reims qui a fait pour sa 2
ème année en D2 certes un classement un peu moins bon mais en ayant néanmoins engrangé plus de points au classement (+5) et avoir bien bataillé pour le podium. Mais encore une fois le chemin pour eux s’est arrêté au 1
er tour des play-offs en étant battu sans équivoque par Annecy en 2 manches secs. On attend donc de voir si des efforts seront faits pour prétendre jouer les 1ers rôles au-delà de la 1
ère phase.
Le cas des équipes réserves et affiliées :
Elles étaient 5 cette saison dont une, Colmar, affiliée à 2 autres clubs alsaciens, Mulhouse en Magnus et Strasbourg en D1. Cela représente donc un quart de l’effectif de la D2 ; un record cette saison. Trois ont participé aux phases finales : Rouen II, Angers II et bien sûr Vaujany, le futur champion de D2 dont nous avons parlé plus haut. Les 2 autres, Amiens II et Colmar, ont été contraint de passer par la poule de maintien. Leurs effectifs sont quasi-exclusivement composés d’espoirs (moins de 23 ans), voire de juniors. L’intérêt premier de leurs présences dans cette division est de leur rajouter des matchs, trop insuffisants en championnat junior élite ou en équipe première car trop souvent cantonnés sur la 4
ème ligne. Le but est donc de leur apporter de l’expérience en se confrontant d’abord à des séniors et de plus à des joueurs de métier dont de nombreux étrangers. C'est incontestablement une fort bonne chose pour le développement des jeunes français souffrants quelque peu de la comparaison avec les autres nations lors des grands rendez-vous internationaux. Mais y a-t-il que du positif à retenir et peut-on dès lors augmenter encore plus leurs présences en D2 ? On se doute que bien d’autres organisations de la Magnus aimeraient, pour le développement de leur centre de formation, être présents. Cela demande réflexion et probablement aménagement si on ne veut pas dénaturer cette division et peut-être compromettre un certain renouvellement en rendant difficile à d’autres organisations la possibilité d’évoluer.
Pour faire plus court, il ne faudrait pas transformer la D2 en succursale de la Magnus. Le risque est d'autant plus réel que le règlement actuel leur permet d'être quasi-intouchables en poule de maintien.
Explication : si l'objectif final est bien de donner du temps de jeu et ainsi de l'expérience aux espoirs, il permet par la même à ces clubs d'intégrer tout joueur de moins de 23 ans. Il est possible de faire appel à eux en poule de maintien dans la mesure où ils auront apparu au moins 3 (ou 5 ?) fois sur les feuilles de match lors de la 1ère phase. Beaucoup de ces clubs ont donc fait appel à des espoirs plus que confirmés, habitués aux joutes de la Magnus ou de D1, lors de la saison régulière, certes avec parcimonie mais juste ce qu'il faut pour être encore sélectionnables au sein de la réserve lors de la lutte contre la relégation. Ainsi on vit, pour ne citer que les plus représentatifs, Tomas Simonsen (international sénior !), Guillaume Roussel, Ilies Djemel pour Amiens et Colin Delatour pour Colmar-Mulhouse, participer au sauvetage de leurs équipes respectives alors qu'ils cumulent chacun autour de 40 matchs en Magnus, de plus fort loin d'une symbolique présence sur le banc (ce qui pouvait être un peu plus le cas des gardiens aussi alignés en élite mais comme backup).
On peut penser que n'étant guère en manque de temps de jeu, leur présence en réserve ne participait guère à leur émancipation mais beaucoup plus au sauvetage de l'équipe réserve de leur club grandement en difficulté. Le cas le plus exemplaire est celui des Titans alsaciens. Alors qu’ils n'ont pu connaître une seule fois la victoire en saison régulière, ils domineront complètement la 2
ème moitié de la poule de relégation. On peut d'ailleurs se poser la question sur la compétitivité de Colmar la saison prochaine, déjà bien mise à mal durant ces derniers mois puisque s'il se confirme que Mulhouse est bien rétrogradé. Il est probable qu’il ne sera plus question que les Scorpions ''prêtent'' leurs joueurs et cela ne pourra qu'affecter grandement l'équipe première de Colmar . . . à moins que les rôles soient inversés et que ce soit Colmar qui réquisitionne après Strasbourg les meilleurs espoirs et les restants pour la D3 mulhousienne si on va au bout de la logique des accords entre les 3 clubs alsaciens.
La
réserve d’Angers s’est faite balayée aussi lors du 1
er tour des play-offs par des parisiens conquérants cette année. Auparavent les
jeunes Ducs ont peiné pour éviter la poule de maintien. Ils ont su cependant, contrairement aux clermontois, négocier les matchs importants pour se mettre hors de portée de ces derniers lorsqu’ils se rapprochaient au classement. De par sa jeunesse l’effectif de cette réserve est très changeant mais on peut penser que la génération prochaine sera meilleure car Angers travaille pour améliorer sa formation pour le futur de son équipe première en Magnus (comme le prouve leur présence en finale des U20).
L’autre réserve,
Rouen. Généralement assez brillants, cette fois
les jeunes Dragons ont eu plus de mal à soutenir la comparaison avec les meilleurs. Ils ont pris la 6
ème place à seulement 3 points du 8
ème. Mais la faiblesse des 2 derniers leur ont assuré sans problème le minimum syndical, c'est-à-dire le maintien. Comme chaque saison, priorité au championnat U20 élite oblige ; sans surprise ils seront sortis dès le 1
er tour.
Poule de maintien :
Comme évoqué plus haut les 2 équipes réserves ou affiliées à un club de Magnus et de D1, Amiens II et Colmar, ont su tirer parti du règlement concernant leur statut particulier et faire par la même le nécessaire pour s’éviter les affres de la relégation. Ainsi donc Wasquehal et Clermont-Ferrand, pourtant favori logique pour ce dernier au vu de la première phase, qui se retrouvent dans la charrette de la relégation. Pour tirer un rapide bilan de ces 2 clubs, les nordistes n’ont réussi en saison régulière à ne remporter qu’une seule rencontre (contre la réserve d’Amiens). Minés, particulièrement en fin de saison, par un effectif trop juste, plus encore quantitativement que qualitativement, les Lions ont très souvent craqué en fin de match. Partis avec seulement 2 étrangers, 1 espagnol formé essentiellement en France et un slovaque et de plus comptant aussi sur les licences bleues en provenance de Dunkerque, les Lions durent vite déchanter. Le slovaque ne resta enfin de compte que le temps de disputer 2 rencontres et finalement l’apport des espoirs dunkerquois probablement pas à la hauteur des espérances car ils ne furent à priori pas si nombreux à venir renforcer l’effectif. La dépendance aux licences bleues semble avoir fragilisé cette équipe lorsque cet apport s’est vu drastiquement réduite. Il semble donc qu’il y a un vrai travail de reconstruction à mener et il se fera en D3. Dans le cas de Clermont, la descente de D1 a entraîné une hémorragie de départs déjà entamée les saisons précédentes. Toute l’équipe quasiment était à rebâtir et cela d’autant plus courageusement que l’on fit beaucoup appel aux jeunes, pour la plupart issue du centre de formation. De plus on limita les renforts à 3 éléments dont hélas un fera défection en fin de saison pour raison familiale alors qu’au contraire les équipes réserves se retrouvaient, elles, renforcées par la venue des meilleurs espoirs rendus disponibles par la fin de championnat de leurs équipes premières. Pari osé mais donc perdu de peu. Maintenant leur espoir de maintien reste accroché à l’intersaison souvent agitée dans le hockey sur glace français. Les malheurs des Scorpions de Mulhouse pourraient faire le bonheur des auvergnats car en cas de rattrapage Clermont-Fd devrait être en tout état de chose le mieux placé pour en profiter. Alors certes rien n’est fait et il reste déjà à savoir si Mulhouse sera remplacé par un club de la D1. Si oui alors par effet domino, Clermont-Fd pourrait voir son repêchage en D2 confirmé. Cela serait un bien beau cadeau pour leurs partisans nombreux assurant à cette équipe une des plus grosses affluences de la division (la 3
ème suivant les chiffres communiqués sur le site de la FFHG).
Ce bilan bien concret laisse perplexe, ce qui demande une sacrée réflexion en la matière. Les aléas cette saison 2022-2023 toutes divisions confondues vont amener quelques surprises à l'intersaison mais est-ce que le hockey français en sortira grandi et gagnant. Nul le sait mais une chose est sure, il va falloir ouvrir un sacré chantier de réflexion pour pérenniser l'avenir de notre hockey...