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Hockey sur glace - Ligue Magnus
IIHF : QUE DEVIENT LE PRÉSIDENT LUC TARDIF ?
 
Elu à la tête de la Fédération internationale depuis trois ans, l’ancien président de la FFHG s’est naturellement éloigné du hockey sur glace français. Tristan Alric, créateur de la Coupe Magnus, a renoué des contacts avec Luc Tardif pour avoir de ses nouvelles.
 
Media Sports Loisirs, Hockey Hebdo Tristan Alric le 19/09/2024 à 11:00
Tribune N°95

 
 
IIHF : QUE DEVIENT LE PRÉSIDENT LUC TARDIF ?
 
 
Depuis son élection au Temple de la Renommée de la FFHG au mois de juin 2022, à l’occasion de laquelle j’avais eu la mission d’évoquer en public sa carrière exceptionnelle de joueur puis de dirigeant, je n’avais plus de nouvelles de Luc Tardif. Mais grâce à un concours de circonstance assez inattendu, j’ai réussi à renouer très récemment un contact direct avec le nouveau président de l’IIHF qui est, on l’imagine, très occupé à cause de sa haute fonction chronophage.
En effet, j’ai retrouvé la trace de Luc Tardif, non pas au siège de la Fédération internationale situé à Zurich en Suisse, mais chez lui en France dans sa maison d’Acquigny, une petite commune située à 40 kilomètres au sud de Rouen. C’est son épouse Dalila qui m’informa que l’ancien président de la FFHG était en train d’achever sa convalescence après avoir subi une opération de la hanche, une « vielle blessure de guerre » aime-t-il à dire en plaisantant. En effet, il avait subi une première intervention chirurgicale en 2017 juste après les Championnats du monde de hockey sur glace qui furent organisés conjointement à Paris et à Cologne et dont Luc Tardif fut l’un des principaux artisans.

 

UN TANDEM EFFICACE AVEC PETR BRIZA


Nous connaissant depuis plus de 45 ans et faisant fi de sa nouvelle stature internationale qui en impose, Luc Tardif me confia en toute simplicité et en me tutoyant : « Je te rassure, je vais très bien car cette opération ce n’est finalement que de la mécanique ! A part ça, je n’ai jamais été en aussi bonne forme physique. Heureusement, car au poste que j’occupe désormais (Il entame sa quatrième année à l’IIHF), il vaut mieux avoir une santé solide. De plus, je m’entends très bien avec le tchèque Petr Briza, le vice-président principal de l’IIHF (ancien gardien de but international comptant à son palmarès sept Mondiaux et trois Jeux Olympiques). Ensemble nous avons une grande connivence, du coup, on se partage sans problème les tâches. »
A l’heure où vous lirez ces lignes Luc Tardif aura déjà repris ses pérégrinations notamment depuis le jeudi 12 septembre dernier où il a eu un premier rendez-vous important à Lausanne en Suisse avec le président du CIO Thomas Bach. Puis le mercredi 18 septembre à Pardubice en République tchèque il a remis au célèbre capitaine international Roman Cervenka le trophée du « joueur de l’année de l’IIHF » la saison passée.

Lorsque je lui demande de m’expliquer quel est son nouvel emploi du temps depuis son arrivée à la tête de l’IIHF, l’ancien hockeyeur vedette de Chamonix puis de Rouen me répond : « Les huit premiers mois après mon élection comme président de la Fédération internationale, ce fut difficile car je n’avais pas de secrétaire général. Je fus donc très souvent en Suisse. J’étais présent à Zurich les lundi, mardi et mercredi. Mais je n’ai pas voulu pour autant souhaiter déménager là-bas. J’ai simplement dû effectuer pas mal de voyages et organiser aussi de nombreuses réunions en visioconférence. Désormais, les choses se sont mis en place et je me rends généralement quinze jours par mois au siège de l’IIHF. Le reste du temps, je peux compter sur l’aide de mon secrétaire général, le finlandais Matti Nurminen. Je reste donc chez moi en France, sauf si j’ai des voyages à faire. Outre le temps passé au siège de l’IIHF, mon agenda prévoit entre 80 et 90 jours sur la route, soit pour des compétitions et des tournois ou bien des réunions officielles. Mais, comme tu le vois, mon foyer fiscal est toujours en France ! »

 
« JE SUIS LES RÉSULTATS DE LA LIGUE MAGNUS »


Pratiquant le vélo dès qu’il le peut pour se maintenir en forme, non seulement en appartement mais aussi à l’extérieur, Luc Tardif n’a pas oublié son ancienne fonction au sein de la FFHG. En effet, il garde toujours un œil - distant mais très intéressé - sur l’actualité quotidienne du hockey sur glace français : « J’essaye de suivre si possible les résultats de toutes les journées de la Ligue Magnus, même si j’ai peu de temps pour voir évidemment tous les matches. Le dernier que j’ai vu c’était à Rouen, mais j’en vois aussi parfois en Suisse. Mais le hockey français, je le suis au jour le jour de près et pas uniquement pour le club de Marseille ! » dit-il en riant.


 
Bien conscient que la présence chez les Spartiates de son fils, Luc Tardif junior, (entraîneur et manager général) ainsi que son demi-frère, Jonathan Zwikel (directeur général et coach adjoint), provoque inévitablement des commentaires pas toujours bienveillants sur sa famille, le président de l’IIHF répond sans détour : « A ce poste de responsabilité, on ne peut pas plaire à tout le monde ! Surtout à ceux qui critiquent mais qui ne font rien. Le club de Marseille, il s’est construit à la force du poignet en sept ou huit ans. Au début, Luc junior avait à sa disposition un petit budget. Du coup, il louait des minibus pour les déplacements et il conduisait lui-même ! Il faisait aussi office « d’équipement-manager » en lavant les maillots des joueurs et en les gardant chez lui ! Bref, c’était l’homme à tout faire… Pour mon fils Luc, et plus tard pour Jonathan, lorsque j’étais président de la FFHG, j’étais plus un problème qu’une aide. Heureusement, avec Eric Lagache, ils ont trouvé un président vraiment au top ! Je félicite les garçons qui ont réussi à bâtir ce nouveau club professionnel de leur propre initiative. C’est une bouffée d’air pur pour la Ligue Magnus ! »
 

« LA PASSATION À LA FFHG S’EST TRÈS BIEN PASSÉE »


Ayant été à la tête du hockey sur glace français pendant quatre mandats successifs depuis la création de la FFHG en 2006, mais ayant été déjà président pendant deux ans avec l’Autorité Exécutive du hockey Français (AEHF) depuis 2004, Luc Tardif n’a-t-il pas eu de l’inquiétude pour laisser son « bébé » dans d’autres mains ? Ce dernier répond : « Non, car j’ai toujours eu en tête une passation de pouvoir bien organisée. C’est ce qui explique que Pierre-Yves Gerbeau était déjà le vice-président exécutif lors de mon dernier mandat. Tout s’est bien passé puisqu’il avait déjà pris les rênes. Depuis mon élection à l’IIHF, avec Gerbeau, on se voit surtout lors des différents congrès. On s’envoie également parfois des messages. Quelquefois, il m’appelle pour me demander des conseils mais il mène seul sa barque et je n’interviens jamais, sauf s’il me le demande. »

 
Les quatorze membres du Comité directeur de l’IIHF.
De gauche à droite. Assis : Henrik Bach Nielsen (DAN), Petr Briza (TCH), Marta Zawadzka (POL), Luc Tardif (FRA), Zsuzsanna Kolbenheyer (HON), Bob Micholson (CAN), Aïvaz Omorkanov (KYR). Debouts : Viesturs Koziols (LET), Anders Larsson (SUE), Raeto Raffainer (SUI), Pavel Bure (RUS), Franz Reindl (ALL), Andréa Gios (ITA), Heikki Hietanen (FIN).

Ayant eu l’occasion de rencontrer « les grands de ce monde » depuis qu’il est à la tête de l’IIHF (il fut aussi ancien chef de mission de la délégation française lors des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014 et de Pyeongchang en 2018), Luc Tardif me raconte que le président russe Vladimir Poutine fut le premier à le féliciter directement lors d’un congrès de l’IIHF à Saint-Pétersbourg. Je profite de cette anecdote pour lui demander si la France aura une chance de participer aux prochains Jeux olympiques d’hiver de 2026 à Milan et Cortina d’Ampezzo.
« La Russie est qualifiée pour le prochain tournoi olympique de hockey grâce à sa deuxième place dans le ranking juste derrière le Canada, explique-t-il. C’est au mois de février 2025 que nous aurons une concertation à ce sujet avec le CIO. Il n’y a pas que la situation géopolitique qui sera prise en compte à ce moment-là, mais aussi le problème du contrôle antidopage car il y a un désaccord qui reste latent avec la Russie. La World Antidopage Association ne reconnait pas l’instance russe RAA Rusada. Nous verrons comment va réagir Thomas Bach qui quittera son poste en 2026… »


VA-T-IL BRIGUER UN NOUVEAU MANDAT À L’IIHF ?


Justement le « Council » de la Fédération internationale de hockey sur glace doit être renouvelé dans deux ans. Luc Tardif compte-t-il se représenter pour briguer un second mandat comme président de l’IIHF ? « Avec le Covid, la guerre en Ukraine et le conflit actuel au Moyen-Orient entre Israël et le Hamas, plus encore d’autres événements, je n’ai pas eu un mandat facile. Il ne faut pas oublier que l’IIHF organise pas moins de 40 événements internationaux par an, dont au total 34 divers Championnats du monde. Mais les motifs de satisfaction ne manquent pas également. Lors des derniers Championnats du monde organisés conjointement à Prague et à Ostrava en République tchèque, il y a eu près de 800 000 spectateurs. Le record d'affluence établi lors de l'édition 2015, déjà organisée en Tchéquie, a été battu ! Mon autre satisfaction personnelle, c’est que la NHL sera présente lors des deux prochaines olympiades : lors des J.O. de 2026 en Italie puis de 2030 en France. C’est à l’initiative de la Fédération internationale que nous avons pu réunir autour de la table à la fois l’IIHF, la NHL, l’association des joueurs professionnels (NHLPA), le CIO ainsi que le Comité d’organisation olympique italien de Milan-Cortina d’Ampezzo. Ce ne fut pas une mince affaire car c’est une négociation avec cinq entités qui aura duré deux ans pour déboucher sur un accord non seulement pour 2026, mais aussi pour 2030. Toutes les parties prenantes ont salué unanimement cet accord. J’ajoute que l’IIHF sort de cette période délicate en bonne santé financière. Depuis le Covid, elle a repris la totalité de ses activités avec succès. Je déciderai donc de ce que je ferai pour l’IIHF un an à l’avance. »
 



« JE SUIS CONFIANT POUR LE MONDIAL EN 2028 »


Entre les deux Jeux olympiques d’hiver à venir, la France doit organiser à nouveau les Championnats du monde élite de hockey sur glace en 2028. Ayant décidé cette fois d’être toute seule à la manœuvre sur deux patinoires, à Paris et à Lyon, contrairement à 2017 (avec Cologne), la FFHG n’a-t-elle pas pris un gros risque sur le plan financier ? « En 2017, si on n’avait pas été contraint à des mesures de sécurité exceptionnelles, nous aurions été à l’équilibre, dit Luc Tardif. Il faut se souvenir qu’il y avait eu une attaque terroriste sur les Champs-Elysées, nous étions en plein milieu d’une élection présidentielle et ce Mondial s’est déroulé également pendant la visite du comité d’évaluation des J.O. de Paris 2024 ! On était face à une situation sécuritaire exceptionnelle donc l’état avait de fortes exigences. Du coup il a fallu augmenter le budget car il n’y avait pas les équipes nécessaires mobilisées ailleurs. Mais le déficit de 450 000 euros a été absorbé en deux ans. Je précise que si on totalisait le coût prévisionnel, il se serait élevé à 900 000 euros ! De plus, à l’époque la Fan Zone a été interdite, or nous avons été privés d’un moyen important pour faire rentrer un peu d’argent avec la vente de maillots, avec les recettes des buvettes ou d’autres accessoires très prisés par les passionnés. Alors, je ne suis pas inquiet pour le Mondial en France en 2028. La FFHG connait bien maintenant la musique grâce à sa première expérience. La Fédération française sera plus armée cette fois et tout le monde sera très content de revenir à Paris et d’aller aussi à Lyon. De plus, ce sera une étape intermédiaire avant les J.O. d’hiver de 2030 qui sont prévus également dans notre pays. »
 

« LE HOCKEY FRANÇAIS A UNE BONNE RÉPUTATION »


Profitant de sa position de nouveau président de l’IIHF qui a une perception forcément beaucoup plus « mondialiste » des choses, grâce à ses très nombreux contacts dans de nombreux pays, j’ai demandé à Luc Tardif comment selon lui le hockey sur glace français était perçu à l’étranger. Ce dernier me répond : « En toute neutralité qui est à présent la mienne, j’ai pu constater que la France est considérée comme un pays de haut niveau dans notre discipline. La sélection tricolore a su parfois tenir la dragée haute à des grandes nations. Rappelez-vous, en 1989 la France a battu pour la première fois la Suisse à Oslo dans un mondial (5-2). Ce fut le début d’un beau parcours ascendant. La preuve, en 1995, les Tricolores ont réussi à battre également le Canada lors du Mondial à Gavle en Suède (4-1). En 1998, lors du Mondial de Zurich, l’équipe de France s’est à nouveau imposée contre les Etats-Unis (3-1), sans oublier la large victoire contre la Finlande en 2017 lors des Championnats du monde organisés à Paris (5-1) avec dans le même tournoi une victoire également contre la Suisse (4-3). Je pourrais ajouter au crédit de la France le quart de finale contre la Finlande disputé en 1995 (défaite 5-0) et le quart de finale contre la Russie en 2014 à Minsk (défaite 3-0). Donc, tout le monde sait que sur un match l’équipe de France est capable d’être un adversaire imprévisible et toujours redoutable qui ne faut pas mésestimer. A son égard, aux yeux des autres nations, il y a donc beaucoup plus de positif que l’inverse. Malheureusement dans notre pays, on a souvent la mauvaise habitude de s’autoflageller ! Finalement, le hockey sur glace français est beaucoup mieux considéré à l’étranger ! La preuve, je remarque que les joueurs tricolores vont faire carrière dans d’autres pays d’Europe ou en Amérique du nord ce qui était très rare lorsque j’ai commencé à jouer en France et jusqu’en 1990. Les internationaux tricolores sont désormais plus jeunes et ils se voient attribuer un rôle plus important dans leurs nouveaux clubs. C’est bien un signe qu’il faut être raisonnablement optimiste pour l’avenir. »

 
L’HISTOIRE DES HUIT FRANÇAIS ÉLUS AU COUNCIL DE L’IIHF


Jusqu’en 1968, année des Jeux olympiques d’hiver de Grenoble, il y eu cinq français qui ont siégé successivement au Comité exécutif de la Fédération internationale de hockey sur glace : Louis Magnus (1909-1924), Alfred de Rauch (1927-1928), Maurice Del Valle (1932-1939), Jacques Lacarrière (1946-1962) et Michel Lebas (1963-1968).
Il faudra attendre quatorze ans avant que la France puisse faire élire à nouveau un représentant au sein du « Council » de l’IIHF en la personne de Jean Ferrand qui siègera pendant un seul mandat à cause de son mauvais état de santé (1982-1986).
Par la suite, l’ancien hockeyeur international Philippe Lacarrière fut élu à son tour au Comité exécutif de l’IIHF lors du congrès de Venise en 1994 au moment où le suisse René Fasel a été élu président. Notre représentant français pris alors en charge la Commission des juniors.
Réélu lors du congrès de Lausanne en 1998, Philippe Lacarrière, très apprécié, notamment par le président René Fasel, pris alors en charge le Comité des arbitres et le Comité des règles de jeu, mais aussi le Comité des équipements. Il a par ailleurs participé à la rénovation du siège de l'IIHF à Zurich et à la construction d'un bâtiment annexe. Mais il ne siègera que pendant deux mandats consécutifs comme membre officiel du Council (1994-2003). Par la suite Philippe Lacarrière fut nommé « membre à vie » de l’IIHF ce qui lui permit d’être appelé à siéger dans différentes commissions, de superviser des championnats internationaux et d’assister à certains congrès.
Le dernier et huitième représentant français en date siégeant au sein du conseil de la Fédération internationale - cette fois avec la plus haute fonction - est donc Luc Tardif qui fut élu une première fois en 2012 comme membre lors du congrès d’Helsinki en obtenant 67 voix au total. Le président de la FFHG fut réélu en 2016 lors du congrès de Moscou, plus confortablement, avec cette fois un total de 72 voix. Il deviendra alors le président du Comité des finances, autrement dit le trésorier de l’IIHF.
Au mois de septembre 2021, Luc Tardif a finalement été élu président de l’IIHF lors du congrès de Saint-Pétersbourg au quatrième tour de scrutin face au favori allemand Franz Reindl, avec 63 % des suffrages (67 voix contre 39). Luc Tardif succéda ainsi à son ami suisse René Fasel qui dirigeait l’IIHF depuis vingt-sept ans et ne se représentait pas.

 




Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique.
 


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