Le principal "problème" de la KHL est donc sa très faible alternance de champions, en cinq ans, seulement trois vainqueurs différents, si de plus on considère qu'Ufa (vainqueur de la Gagarin en 2011) avait été le dernier vainqueur de la défunte Superliga en 2008.
Un doublé pour Kazan en 2009 et 2010 puis un doublé pour le Dynamo Moscou en 2012 et 2013, dynastie pour les uns, ennui pour les autres. Qu'en penser ? Le système de la KHL entraînerait-il un nombre restreint de champions possibles ?
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L'AK Bars Kazan champion en 2009 et 2010 |
Il faut en fait remonter plus loin pour voir que les championnats passés n'avaient que guère plus d'alternance : Magnitogorsk, Iaroslav, le Dynamo Moscou se partageaient la part du lion, Kazan, Ufa et Togliatti faisaient quelquefois leur apparition au bout, mais rien de comparable à une ligue type NHL avec une alternance quasi maximale.
L'arrivée des nouveaux clubs ne fait pas vraiment bouger les choses : Ekaterinbourg, Khanty-Mansiysk, Vladivostok, Astana, Minsk, Riga, Donetsk, Zagreb semblent loin de la Coupe Gagarin, le Lev Prague et le Slovan Bratislava faisant un peu exception et pouvant à terme s'imposer comme de solides puissances de la KHL.
L'avenir de l'extension ne semble pas non plus pouvoir donner plus de changement au maître de la Gagarin, le retour de Togliatti peut bousculer le milieu de tableau, mais guère plus, Tyumen sera-t-il à la hauteur ? Quelle équipe sera alignée à Sotchi ou à Gdansk ? Les deux lumières d'espoir pour les théoriciens de l'alternance seraient avec les Autrichiens du Red Bull Salzburg dont le club junior intègre la MHL à la rentrée et les Allemands des Scorpions de Hanovre qui, pour sauver leur club, sont prêts à se ruer à l'Est.
L'expansion de la KHL ne semble pas conduire à une hausse du nombre de vainqueurs de la Coupe Gagarin qui reste pour l'instant une récompense de privilégiés.
Les play off KHL : un club privé ?
Penchons-nous désormais sur les play off de la meilleure ligue d'Europe, sont-ils eux aussi la chasse gardée de quelques-uns ?
A l'Ouest, la compétition est acharnée, en témoigne cette année, l'ultime ticket distribué lors de la dernière journée du championnat, alors que trois clubs se la disputait : Atlant Mytishtshi, Dynamo Minsk et Donbass Donetsk. Si la compétition est âpre, il s'agit en fait de l'attribution des places médianes, en effet moins de dix points séparent la sixième de la onzième place occidentale. Mais le haut de tableau est verrouillé et on retrouve nos camarades : Dynamo Moscou, Saint-Petersbourg, Iaroslav et le CSKA Moscou qui s'est invité à la fête à coups de millions. Ce "cercle" semble inébranlable et devrait régner sans partage sur la conférence pendant encore de longues saisons. En play off, si ce n'est le couac du Loko contre les Sidérurgistes de Tcherepovets habitués à l'exercice eux aussi, les ténors ont rempli le contrat et de bien belle manière. Les deux clubs de la capitale se payant le luxe de balayer leurs adversaires tchéco-slovaques, le SKA l'emportant lui 4-1. L'éternel couple Dynamo-SKA se retrouvait en finale de conférence pour la seconde année d'affilée en étrillant leur rivaux (4-1 et 4-0). Une fois encore, le SKA, gonflé d'argent et d'orgueil, sortait à ce niveau face aux expérimentés et disciplinés Dynamistes. L'Ouest est, depuis deux ans, la proprieté des Moscovites de la police, on peut même compter 3 si on reprend le résultat du HK MVD avant sa fusion avec le Dynamo. L'Atlant et le Lokomotiv ayant pris les tickets lors des éditions passées.
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Le Salavat Yulaev Ufa champion en 2011 |
L'Occident semble donc un club très privé, mais l'Orient l'est encore plus.
En effet, cinq ténors se partagent sans pitié le gâteau : Kazan, Tchelyabinsk, Magnitogorsk, Omsk et Ufa. Derrière ces machines, le Barys Astana parvient toujours à prendre une place et à se montrer un empêcheur de tourner en rond notoire. Les deux derniers fauteuils sont soumis à l'âpre lutte entre le Neftekhimik abonné présent, le Yugra, le Sibir et plus loin : Novokuznetsk, Khabarovsk et Ekaterinbourg. Les play off de conférence semble figés et les "petits" ne passent jamais le premier tour même s'ils se montrent souvent redoutables. On retrouve donc 4 ténors sur cinq en demi-finale, un passant à la trappe chaque année (MMK cette année, Ufa en 2012...). Une fois entre soi, les favoris sont en terrain connu et le champion oriental varie donc : Kazan à deux reprises, puis Ufa, puis Omsk, puis Tchelyabinsk. 4 champions différents en cinq ans, le résultat final varie donc, mais toujours entre les mêmes équipes. Le Traktor a, par exemple, réalisé deux finales orientales consécutives en 2012 et 2013, l'Ak Bars en est à 3 sur 5 !
En finale, le suspense est plus important avec 3 victoires du club oriental contre deux du représentant occidental. Sur 5 finales : trois sont allées en 7 rencontres, une en 6 et une en 5. Mais la Coupe reste aux mains d'une petite minorité de trois vainqueurs bienheureux.
Une saison qui privilégie le suspense :
Si les play off sont élitistes, la saison est, elle, plus disputée même si le résultat final entraîne toujours la domination d'une poignée de favoris, connus d'avance. Les grandes puissances : Dynamo Moscou, Saint-Petersbourg, Kazan, Tchelyabinsk ne passent pas toujours des saisons de rêve et doivent souvent batailler pour réussir à prendre les meilleures places. Certains se font des spécialités de surprise tonitruante : Avtomobilist, Yugra... D'autres sont intraitables à domicile : Khabarovsk, Riga...
Finalement, la saison reste à suspense et souvent peu d'équipes sont décrochées très longtemps à l'avance. Certaines n'atteignent jamais les play off, mais elles sont peu nombreuses, nous n'inclurons pas Donetsk, vu que les Ukrainiens n'ont réalisé qu'une seule saison pour l'instant. Ils ne sont en effet que deux (les deux plus petits budgets) à n'avoir jamais connu de post-saison, le Vityaz Tchekhov et le Metallurg Novokuznetsk. Pourtant, ces deux équipes ne sont pas des victimes expiatoires, le Vityaz s'est souvent offert des départs canons et cette saison termine à une honorable douzième place, Novokuznetsk, englué dans des problèmes financiers, a, cette année, longtemps flirté avec les bonnes places avant de s'effondrer.
Novokuznetsk a épongé très tôt ses dettes et est en train d'assurer sa stabilité financière, le club sibérien continue son recrutement basé sur la jeunesse et débusque des talents. Son équipe MHL les Kuznetsky Medved sont craints et respectés au niveau junior. Le Vityaz, lui, a fait peau neuve, il déménage à Podolsk, a renvoyé ses goons, propose un budget parfaitement sain et a engagé de très bons joueurs. Les deux petits poucets repartent pour 2013 sur des bases saines pour tenter de s'inviter à la fête.
La saison régulière de la KHL est donc ouverte à tous, mais il faut se contenter des miettes que laissent les ogres. Ce qui rend tout de même le championnat captivant puisque la lutte reste acharnée et les dernières places sont convoitées et accessibles à tous.
Vers un rééquilibrage ?
Quel est l'avenir de la KHL, une ligue de quelques privilégiés ou une ouverture qui permettra un rééquilibrage dans un avenir plus ou moins proche ? On l'a dit, l'extension ne semble pas vraiment apparaître comme une solution viable à l'alternance des champions.
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Le Dynamo Moscou champion en 2012 et 2013 |
En Orient, les choses peuvent bouger, l'arrivée de Vladivostok risque de resserrer la course aux play off, en effet l'Admiral présente pour l'instant une équipe intéressante et se mêlera donc sans aucun doute à la lutte pour un ticket en vue des play off. Sera-t-il de taille à lutter contre le "club des cinq" ? On peut franchement en douter, mais le résultat sera à voir pour le long terme. L'autre point important, c'est le déplacement du Torpedo Nijni Novgorod de l'Occident vers la conférence Est. Le club de la Volga-Viatka, enrichi du soutien de Lukoil, a dépensé de grosses sommes à l'intersaison pour se créer une équipe à sa mesure. Le Torpedo annonce qu'il vise une finale de la Coupe Gagarin, redescendons un peu sur terre mais il est vrai que le club au cerf risque de gêner un paquet de monde en Orient et peut s'imposer comme un favori et faire exploser le "club des cinq". Avec Nijni Novgorod, on prend un sixième ticket quasiment d'office, si on accorde le 7ème à Astana, cela veut dire que le solide Admiral pourrait prendre le 8ème et laisser les autres sur le carreau. Finalement, la course aux deux derniers billets risque d'être mortelle en Orient.
En Occident, l'arrivée du Medvescak Zagreb, bourré de Nord-Américains, risque de gêner quelques clubs dans le milieu de tableau. Le club croate devra tout de même batailler ferme pour se glisser vers les sommets, avec le retour aux affaires du Vityaz et du Spartak, la conférence devrait être extrêmement serrée. Minsk et Riga, bien calmes sur le marché des transferts, risquent de payer les pots cassés. Mais Saint-Petersbourg et le CSKA Moscou qui font chauffer les pétro-roubles pour s'attirer les meilleurs joueurs devraient rester aux avant-postes. Parviendront-ils à venir à bout de la Dynastie-Dynamo ?
Le principal changement en Occident reste le mouvement dans les divisions, le Dynamo Moscou se retrouve dans la division Tarasov mettant fin à la lutte à mort avec le SKA pour le contrôle de la division Bobrov. Saint-Petersbourg perd sa bête noire mais retrouve les nouveaux riches du CSKA Moscou pour une lutte qui s'annonce épique. Zagreb est également placé dans cette conférence. Le Vityaz Podolsk se déplace également dans la division Tarasov. Ce rééquilibrage des divisions au sein de la conférence entraîne un redécoupage des rivalités et une lutte pour les play off sans doute plus intense.
La KHL reste aux mains d'une poignée de ténors, et certains semblent bien loin de ce partage "entre-soi". Le club de favoris n'est pas forcément une question de budget, et le Dynamo Moscou fait mentir la loi de l'argent-roi depuis deux saisons. Mais pour autant les play off semblent réservés à une élite et le titre de champion peine à se diversifier. Les différentes intégrations, les nouveaux transferts de joueurs ainsi que les réorganisations des conférences et divisions tendent vers un rééquilibrage et montrent bien la volonté de la KHL de diversifier ses vainqueurs et de devenir une ligue parfaitement équilibrée à l'instar de sa rivale de l'Ouest : la NHL.