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Hockey sur glace - Tribune libre de Tristan Alric |
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Hockey sur glace - 16 / TOURS A LANCÉ LE HOCKEY PRO EN FRANCE ! |
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Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique. |
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Tribune N°16
Au cours de l’année 1980 - il y a donc tout juste 40 ans - un tournant important et irréversible s’est produit dans l’histoire du hockey sur glace français. A cette époque, je venais juste de débuter ma carrière de journaliste spécialiste du hockey dans le quotidien L’Equipe. Je garde un grand souvenir de mes débuts dans la presse nationale car, comme entrée en matière, j'ai été servi ! En effet, j’ai eu l’occasion de commenter un championnat de France de la Nationale A (Ligue Magnus aujourd’hui) totalement inédit où l’équipe du club de Tours exerça une suprématie impressionnante.
Grâce à un recrutement massif de renforts extérieurs, ce qui était encore nouveau à l’époque, et la création d’une équipe où, pour la première fois, la totalité des joueurs étaient payés, les « Mammouths » de Tours écrasèrent tout sur leur passage. Soutenu financièrement par l’enseigne d’hypermarché dont il arborait le célèbre logo sur ses maillots, le club de l’ASG Tours remporta pour la première fois de son histoire le titre de champion de France. Un événement puisque c’était un an seulement après avoir assisté au trentième sacre historique de Chamonix.
Pendant son parcours inattendu, l’équipe tourangelle, entraînée par le tchèque Adolf Sprincl, était composée d’un nombre impressionnant de vedettes : André Peloffy, Joe Fidler, Guy Galiay, Jean Stinco, Patrick Sawyerr, Michel Lussier, les frères Phillipe et Jean-Yves Decock, Patrick Aldrich, Bernard Bonnarme, Philippe Quinsac, Christophe Pasquier, Alain Blanchet, Yvon Bourgaut, le capitaine Pascal Del Monaco, Frank Fazilleau (dont le nom fut mal orthographié ici sur sa photo) ou encore les gardiens Charly Thillien, Patrick Partouche et Frédéric Malletroit. Que du lourd !
Les saisons suivantes, sous la direction très mouvementée du nouveau coach Richard Jameison (remplacé momentanément avant son retour par divers joueurs), d’autres vedettes passeront également dans la formation tourangelle pour se mélanger aux meilleurs joueurs locaux : Paulin Bordeleau, Roland Cloutier, Antoine Richer, Serge Evdokimoff, Pierre-Yves Fristchy, Patrick Daley ou encore Marc Audisio. C’était un casting de rêve à l’époque !
Toutefois, si le club de Tours ne put conserver son hégémonie et a fini par rentrer dans le rang, même sous la nouvelle appellation des « Diables Noirs » puis celle des « Remparts », c’est parce qu’un grand nombre de ses renforts furent rapidement débauchés et devinrent par la suite les piliers de divers autres clubs français. Car si les dirigeants des clubs concurrents crièrent tout d’abord au scandale (certains demandèrent la disqualification de Tours en championnat !), ils se lancèrent eux-aussi immédiatement dans une course effrénée à l’armement...
Cette première équipe professionnelle, créée par le président Albert Pasquier avec la complicité de son ami Henri Bourgeais, provoqua de très vives réactions dans les autres clubs français dont la majorité se trouvaient dans la région des Alpes (Chamonix, Gap, Grenoble, Saint-Gervais, Megève, Villard-de-Lans) et qui continuaient à appliquer traditionnellement une politique de recrutement presque uniquement local. Du coup, la plupart des joueurs travaillaient pendant la semaine et se contentaient de jouer au hockey sur glace tous les samedis moyennant des primes de matches.
Lors de la saison 1979-1980, le hockey sur glace français a donc changé soudainement d’époque en abandonnant l’amateurisme. Mais cette révolution de palet ne s’est donc pas faite en douceur. En effet, certains matches du championnat furent très houleux car les supporters des clubs adverses ne cessaient de siffler et de conspuer les hockeyeurs de Tours les accusant d’être des « mercenaires », une véritable insulte à l’époque ! Dans des articles publiés par les journaux, ou lors des interviews diffusées à la télévision, les hockeyeurs tourangeaux reconnaissaient avec franchise et sans état d’âme qu’ils percevaient désormais de vrais salaires, ce qui ne faisait qu’attiser les passions et les réactions hostiles. Dès que l’équipe d’Indre-et-Loire montait sur une patinoire adverse, elle était reçue presque systématiquement avec des jets de pièces de monnaie sur la glace et sous les invectives des spectateurs...
Si cette hystérie collective prête aujourd’hui à sourire, la vie de ces pionniers du professionnalisme (encore modeste) n’a pas été facile sur le coup. Mais, avec le recul, tous ces anciens joueurs confient qu’ils en gardent aujourd’hui un souvenir amusé. Grâce à cette rémunération collective désormais affichée, notre sport a pu ainsi progresser avec l’aide de ces nouveaux renforts extérieurs qui étaient originaires pour la plupart du Canada et ayant souvent la double nationalité. Ce fut en effet l’époque du recrutement important des Franco-canadiens dans tous les clubs de l’hexagone comme en équipe de France où l’on a compté jusqu’à onze Québécois !
Certains anciens supporters me confient parfois qu’ils sont nostalgiques de l’époque du hockey amateur en élite car cette révolution a provoqué inévitablement la disparition rapide des équipes locales formées presque entièrement avec les « enfants du pays » qui étaient enracinés dans leurs clubs. C’est cette grande proximité qui explique que le public était très passionné car - surtout dans les stations - il aimait venir voir patiner le fils du boucher, le boulanger, le menuisier, le garagiste, le pompier ou encore les employés municipaux. Bref, c’est en 1980 que le hockey français a changé d’époque.
De nos jours, le professionnalisme s’est encore accentué dans le hockey français avec une augmentation des salaires, mais surtout du nombre de matches et des journées de championnat. En fait, on est passé du semi-professionnalisme du début à un circuit beaucoup plus professionnel aujourd’hui. Il est sans commune mesure cependant avec celui des grands sports collectifs comme le foot ou le rugby qui brassent des énormes sommes d’argent. Mais, plus modestement, la Ligue Magnus a donc pris un nouveau tournant ces quatre dernières saisons. L’obligation d’utiliser un nombre plus important de joueurs formés localement (JFL) apaisera peut-être un peu les regrets des partisans de cette époque amateur où on voyait jouer uniquement des « enfants du cru ». Encore faut-il que les clubs formateurs puissent garder leurs jeunes espoirs locaux qui sont très courtisés. Comme je l’ai déjà évoqué dans des tribunes précédentes, c’est la grande préoccupation des clubs français actuellement avec également les conséquences encore imprévisibles de la crise économique causée par la pandémie du Coronavirus.
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Lieu : Média Sports Loisirs | Chroniqueur : Tristan Alric |
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Posté par
| le 09/10/2020 à 11:30 |
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