Ce sont les hockeyeurs de Chamonix qui furent les premiers à arborer une tête de chamois sur leurs maillots au début du siècle dernier en référence à cet animal qui vit à l’état sauvage dans les Alpes. Mais, il s’agissait encore d’une simple décoration vestimentaire. En fait, c’est le club des « Français Volants » de Paris qui fut le premier à créer officiellement un
logo et qui a adopté par la même occasion
un
surnom original lors de ses débuts en 1933.
En effet, la presse anglaise fut à l’origine de cette appellation imagée car un journaliste sportif parla à plusieurs reprises des « French Flyers » pour évoquer les hockeyeurs parisiens en raison des nombreux déplacements qu’ils effectuaient en avion. Ce surnom fut astucieusement conservé par Jacques Lacarrière, le président-fondateur du club parisien, qui se contenta de le reprendre à son compte en le traduisant en français.
L’ex-défenseur international, qui était âgé de 27 ans à l’époque, créa par la même occasion un logo très évocateur représentant deux grandes ailes déployées en s’inspirant de celles qui étaient dessinées sur le blason militaire de la Royal Canadian Air Force dont la devise latine « Per ardua ad astra » peut traduire par la formule « A travers les embûches jusqu’aux étoiles ». On remarquera que les deux lettres superposées,
F et
V, qui figurent au centre du logo des Français Volants (voir photo), représentent à la fois les initiales du club parisien, mais peuvent signifier également, au sens figuré, les mots Force et Victoire.
Toutefois, il faudra attendre encore un demi-siècle,
au début des années 1980, avant que tous les clubs français de hockey sur glace décident de choisir à leur tour, presque simultanément, un logo avec un surnom en adoptant souvent des noms d’animaux une idée amusante d’anthropomorphisme sportif puisque désormais les anciens « Renards » d’Amiens pouvaient par exemple défier en championnat de France les « Ours » de Villard-de-Lans ou les « Aigles » de Saint-Gervais.
En prenant cette initiative, nos clubs ont voulu ainsi copier une tradition qui existait depuis longtemps déjà dans les sports collectifs nord-américains, notamment dans la NHL où se côtoient les « Pingouins » de Pittsburgh, les « Requins » de San José, les « Canards » d’Anaheim, les « Panthères » de Floride ou encore les « Coyotes » de l’Arizona. Le but des clubs français fut également de se doter d’une image décalée beaucoup plus accrocheuse médiatiquement dans un pays peu habitué à cette mode. Désormais chaque club de hockey sur glace de l’hexagone posséda individuellement un « marqueur » original facilement reconnaissable et porté fièrement par leurs supporters. Car il ne faut pas oublier l’intérêt financier que peut rapporter l’exploitation du merchandising d’un logo qui peut être imprimé sur divers supports comme des blousons, des bonnets, des palets ou des écharpes permettant ainsi la promotion du club.
Dans certains clubs le choix d’un surnom s’est fait grâce
à un vote interne après consultation des joueurs, des dirigeants et parfois des supporters. Mais d’autres méthodes furent employées pour tenter de trouver l’idée originale afin de créer ce fameux logo en prenant en compte plusieurs facteurs.
C’est ainsi que le surnom choisi a repris parfois l’image déjà utilisée par
un sponsor local comme par exemple les «
Ecureuils » à Amiens car à une époque c’était la banque Caisse d’Epargne qui finançait le club. Même chose pour les anciens «
Mammouths » de Tours car le supermarché du même nom était son principal partenaire. A Reims, le club opta pour les «
Flammes Bleues » après avoir signé un partenariat avec l’entreprise Deville qui était spécialisée dans le chauffage à bois. A Epinal, avant son récent retrait de la Ligue Magnus, le club s’appelait le «
Gamyo » du nom de son sponsor, une entreprise de jeux vidéo basée dans la préfecture des Vosges.
Mais d’autres clubs français ont choisi leurs surnoms en se référant cette fois à
l’histoire de leur ville. Ce fut le cas à Dunkerque avec un vote unanime en faveur des «
Corsaires ». En effet, le personnage historique et emblématique de la ville du département du Nord est le célèbre marin chasseur de pirates
Jean Bart qui fut un grand serviteur du roi Louis XIV. On notera que le club de Nantes a opté pour le même surnom de « Corsaires » mais uniquement pour utiliser l’image conquérante que ce surnom évoque dans les esprits.
A Belfort, le club a choisi tout aussi spontanément et en toute logique le nom des «
Lions » car c’est dans la ville de Franche-Comté que se trouve le célèbre monument du Lion de Belfort, œuvre du sculpteur alsacien Auguste Bartholdi qui commémore la résistance de la ville assiégée par les Prussiens durant la guerre franco-allemande de 1870. Comme on le sait, ce sculpteur fut également l’auteur de la statue de la liberté de New York.
A Viry-Châtillon, le club a aussi choisi un surnom pour faire référence à l’histoire de la ville. Pour l’anecdote, j’avais demandé à l’époque à Patrice Pourtanel qu’elle était la particularité de sa commune. Ce dernier, qui dirigeait le club castelvirois avec son père Claude, m’expliqua que c’est à Viry-Châtillon que fut construit le premier aérodrome en France. Je lui ai alors proposé de surnommer désormais ses joueurs les «
Jets » dans mes articles qui étaient publiés régulièrement dans le journal L’Equipe. Il accepta ma suggestion et c’est ainsi que ce surnom a été adopté officiellement.
Pratiquement à la même période, j’ai fait également une suggestion à Briançon quand le club des Hautes-Alpes décida de choisir la couleur rouge sur ses maillots comme l’imposait la publicité visuelle d’un sponsor local. Lors d’un déplacement sur place, j’ai confié à l’ancien président de Briançon Philippe Pacull : « Depuis le début de la saison vos joueurs se battent comme des diables. Ce n’est pas les Rouges qu’il faut les surnommer, mais les « Diables Rouges » ! Si vous êtes d’accord, je donnerai régulièrement ce surnom plus sympa à votre équipe dans mes articles. Vous devriez l’adopter car sur le plan marketing ce serait plus vendeur. » L’ayant également convaincu, c’est ainsi que l’habitude fut prise peu à peu de désigner l’équipe de Briançon les «
Diables Rouges », un surnom qui finira par être adopté officiellement par le HCB pour en faire son logo et son image promotionnelle.
Le club d’Angers opta quant à lui, mais de sa propre initiative cette fois, le surnom des «
Ducs » en associant habilement le titre de noblesse de son histoire médiévale locale avec l’autre grand-duc, issu cette fois du monde animalier, à savoir le hibou qui est un rapace nocturne au regard perçant.
Pour le club d’Annecy, ce fut le choix des «
Chevaliers du Lac » car cette appellation avait là encore une double signification. En effet, dans le lac d’Annecy, les pêcheurs ramenaient parfois dans leurs filets « l’omble chevalier » qui est un poisson rare de la famille des saumons dont on retrouve le dessin sur le blason de la ville de la Haute-Savoie. De plus, Annecy étant une cité médiévale le choix des Chevaliers s’imposait. C’est ce qui explique la présence sur le logo des donjons du château des ducs du genevois.
Certains clubs ont tenu en revanche à faire référence à leur forte
identité régionale comme celui d’Anglet qui a choisi comme nom original «
Hormadi » un mot basque que l’on peut traduire à la fois par « glace » ou « endroit froid ». De son côté, le club de Brest, avant d’opter pour les « Albatros », avait choisi à ses débuts le nom de «
Pen Baz » qui désigne en breton le bâton traditionnel utilisé par les paysans de la région. En choisissant cette appellation, le premier président brestois Jean Le Guily voulut faire un rapprochement astucieux entre le bâton de berger et la crosse de hockey sur glace. Par ailleurs, à Saint-Brieuc, si on en croit la légende, à l’origine l’Armorique grouillait de créatures merveilleuses qui s’appelaient «
les Korrigans ». Il n’en fallait pas plus pour que le club breton adopte ce surnom particulier.
Mais, dans leur très grande majorité, nos clubs de hockey sur glace, privés de références évidentes, ont choisi de puiser dans le large domaine
animalier pour choisir un surnom même si l’adoption du logo ne fut pas un choix forcément…bête. Quand on se penche sur la question, on s’aperçoit que l’animal le plus utilisé en France dans les patinoires est sans conteste les «
Aigles » puisque 10 clubs au total ont adopté au départ cet oiseau sauvage ou l’utilisent encore actuellement : Athis-Paray, Besançon, Flixecourt, Font-Romeu, Gap, La Roche-sur-Yon, Nice, Saint-Gervais, Serre-Chevalier et Valloire.
Dans le haut du classement, on trouve en deuxième position le surnom très prisé des «
Lions » qui a été choisi par 6 clubs : Argenteuil, Belfort, Châtellerault, Compiègne, Lyon et Wasquehal. Puis viennent ensuite des groupes comprenant quatre clubs qui partagent ensemble soit le surnom des «
Grizzlys » (Vaujany, Garges, Niort, Les Orres), soit des «
Lynx » (Gérardmer, Valence, Les Houches, Samoëns), soit des «
Renards » (Issoudun, Le Mans, Orléans, Roanne).
Ensuite, il y a des groupes comprenant trois clubs qui partagent ensemble soit le surnom des «
Castors » (Albertville, Asnières, Avignon), soit des «
Tigres » (ACBB, Béthune, La Rosière), soit des «
Yétis » (Alpe d’Huez, Megève, Mont-Blanc), soit des «
Crocodiles » (Cléon, Mont Genèvre, Nîmes), soit des «
Ducs » (Angers, Dijon, Brive), soit des «
Loups » (Combloux, Louviers, Saint-Ouen).
Mais pour être complet, il y a aussi une longue liste de clubs qui ont choisi un surnom unique ou très peu partagé. Car dans le grand bestiaire très hétéroclite du hockey sur glace français, on trouve également des «
Vipères » à Montpellier, des «
Scorpions » à Mulhouse, des «
Panthères » à Embrun, des «
Pumas » à Fontenay, des «
Pingouins » à Morzine, des «
Cormorans » à Rennes, des «
Cougars » à Saint-Pierre-et-Miquelon, des «
Requins » à Franconville, des «
Espadons » à Saint-Nazaire, des «
Bélougas » à Toulouse, des «
Bouquetins » à Cauterets et au HCMP, des «
Sangliers » à Clermont-Ferrand et à Charleville, des «
Alligators » à Bourgueil, des «
Elans » à Champigny, des «
Boxers » à Bordeaux, des «
Dogs » à Amnéville et à Cholet, des «
Bull Terriers » à Castres, des «
Rapaces » à Gap, des «
Eléphants » à Chambéry, des «
Hérissons » à Joué-lès-Tours, des «
Millepattes » à Colombes, des «
Coqs » à Courbevoie, des «
Mouflons » au Lioran, des «
Ours » à Villard-de-Lans, des «
Bisons » à Neuilly, des «
Kodiaks » à Chamrousse (sous-espèce de l'ours brun), des «
Caribous » à Dammarie, des «
Béliers » à Lanester, des «
Taureaux » à Limoges, des «
Boucs » à Megève, des «
Ecureuils » à Monclar, des «
White Tigers » à Narbonne, des «
Goupils » au Mont-Dore et enfin un «
Phénix » à Reims qui est un oiseau légendaire doué d'une grande longévité et caractérisé par son pouvoir de renaître après s'être consumé dans les anciennes « Flammes Bleues » du club.
Certains clubs de hockey français, en activité ou disparus, n’ont cependant pas cherché « la petite bête » pour choisir le nom de leurs logos sur lesquels ne figurent donc pas un animal. Il y a les «
Dragons » à Rouen et à Poitiers, les «
Gothiques » à Amiens, les «
Diables Rouges » à Briançon et à Valenciennes, les «
Jokers » à Cergy, «
L’Etoile Noire » à Strasbourg, les «
Spartiates » à Marseille et à Vars, les «
Remparts » à Tours, les «
Comètes » à Meudon, les «
Gaulois » à Châlons, les «
Anges » au Vésinet puis à Colombes, les «
Drakkars » à Caen, les «
Vikings » à Cherbourg et à Vitry, les «
Celtics » à Quimper, les «
Apaches » à Toul, les «
Boucaniers » à Toulon, les «
Dock’s » au Havre, les «
Pionniers » à Chamonix, les «
Titans » à Colmar, les «
Eclairs » à Saint-Martin-en-Campagne, les «
Ice Demons » à Vannes, les «
Métropolitains » à Lille puis à Croix, les «
Chiefs » à Deuil, les «
Peaux-Rouges » à Evry, les «
Graoully » à Metz (en référence à une sorte de dragon à bec de canard représenté dans la cathédrale), les «
Brûleurs de Loups » à Grenoble (pour faire référence à une légende locale) et les «
Missiles » à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Enfin, il y a deux clubs qui ont su faire preuve d’originalité et de créativité. En effet, le club de La Roche-sur-Yon en Vendée a inventé un acronyme singulier le «
Hogly » en combinant certaines lettres issues du nom composé : hockey-glace-Yonnais (HO-GL-Y). De son côté, le club de Laon dans l’Aisne a opté pour un jeu de mot astucieux associant le nom de sa ville et l’élan, ce mammifère de la famille des cervidés ce qui donne les «
Elaons ». Enfin, le club d’Orcières-Merlette, près de Gap dans les Hautes-Alpes, a lui cherché la petite bête en choisissant une partie seulement d’un animal en l’occurrence les «
Griffes de l’Ours ».