La ville de Londres nous as-t-elle envoyé un homme providentiel ? Qu’on aime ou pas
Pierre-Yves Gerbeau, il faut reconnaitre, sans faire preuve de complaisance à son égard, que depuis sa nomination il y a cinq ans, d’abord comme vice-président exécutif de la FFHG, puis comme président en exercice, l’ancien international tente de faire « bouger les lignes » dans nos patinoires. Ses méthodes de management, très innovantes, et son franc-parler qui n’est pas toujours politiquement correct, provoquent inévitablement des réactions en tous genres. Mais sa marche en avant à pas forcés, un peu à la hussarde, va-t-elle permettre au hockey sur glace français de sortir enfin par le haut et en finir avec son anonymat médiatique ?
L’avenir nous le dira. Quoi qu’il en soit, cet homme d’affaires, spécialiste de reprise d’entreprises en difficulté et patron d’un projet de parc d’attraction colossal, essaye visiblement de mettre son expérience professionnelle au service de notre de discipline devenue aux yeux des journalistes les moins impliqués un peu trop « exotique ».
Du coup, Pierre-Yves Gerbeau se lance parfois dans des déclarations qui peuvent paraître sportivement saugrenues mais qu’il assume totalement. Comme celle qui concerne l’équipe de France senior masculine lorsqu’il dit avec une étonnante conviction qui peut paraitre volontairement un peu provocante :
« A long terme notre objectif, c’est que notre sélection nationale soit dans les huit meilleures nations du monde plutôt que dans les seize qui forment actuellement les deux groupes du Mondial élite. Oui, c’est bien l’objectif ambitieux que mon équipe dirigeante a porté lors des dernières élections fédérales. J’assume que c’est un vrai changement, je peux même dire une révolution ! »
Lors de sa prise de fonction, l’entraîneur national
Philippe Bozon avait déclaré à juste titre : « Je veux dans ma sélection des joueurs qui viennent uniquement pour mouiller le maillot ! ». Evoquant ce souhait fort louable, je fais observer au président de la FFHG que lors du dernier Mondial à Tampere cela resta un vœu pieux puisque ce ne fut visiblement pas le cas. Notamment lors des cuisantes défaites concédées contre la Suède (4-0), les Etats-Unis (9-0) et l’Allemagne (5-0). Pierre-Yves Gerbeau n’élude pas ces défaillances.
« Il y a bien sûr ces trois raclées qui ont pu choquer par leur ampleur. Mais c’est surtout dans les matches de chiffonniers décisifs qu’on fait un blocage psychologique. Sans parler d’un manque évident de discipline avec les trois expulsions de Texier contre l’Autriche, Claireaux contre le Danemark et de Farnier contre l’Allemagne. Cependant, il faut quand même temporiser l’analyse car notre sélection tricolore, qui a réussi malgré tout à se maintenir dans l’élite mondiale, et c’était l’essentiel, est désormais formée par des jeunes dont la majorité à moins de 23 ans. Je vais vous surprendre, mais malgré les apparences ma plus grande satisfaction lors de ce Mondial, c’est l’esprit collectif de ce groupe que j’ai vu. »
Avant d’ajouter cependant un dernier tacle :
« Il faut résoudre le problème de nos gardiens de but car il nous manque un titulaire vraiment dominant comme ce fut le cas à l’époque avec Fabrice Lhenry et Cristobal Huet. »
Alors, quelles solutions propose Pierre-Yves Gerbeau pour que nos équipes nationales ne soient plus systématiquement dans une situation d’urgence lors de leurs divers championnats du monde ? Comme ce fut notamment le cas pour les juniors U18 qui ont été relégués cette année et pour leurs aînés qui ont eu une fois encore très chaud à Tampere ?
« Je vais être très clair concernant nos jeunes U18. Il ne faut pas se chercher des excuses. Nous ne sommes pas contents du tout car ce fut un véritable naufrage ! Il va falloir recadrer sérieusement les choses... Ceci dit, la solution se trouve dans une refonte beaucoup plus globale du mode de formation du hockey Français et nous sommes en train justement de la mettre en place comme je l’expliquerai lors de l’assemblée générale. »
Même s’il accepte de lire des critiques parfois sévères sur les réseaux sociaux,
« qui viennent souvent de la part des yakafokon qui pensent avoir la recette miracle » dit le président de la FFHG, ce dernier n’apprécie visiblement pas qu’on accuse son équipe fédérale d’immobilisme et de gérer uniquement les affaires courantes sans perspective à long terme.
« Faut arrêter avec ça ! Nous avons totalisé cette saison pas moins de 30 heures de visioconférences avec 60 clubs qui ont participé à nos débats. Vous appelez çà de l’immobilisme ? Je crois que les gens ne se rendent pas encore bien compte que l’on va assister à un véritable changement de notre système. Pour devenir beaucoup plus performant, notamment au niveau international, nous allons mettre en place un tunnel de performance dans lequel nos hockeyeurs devront passer systématiquement. Pour faire très court, en 2024 il y aura quatre pôles espoirs qui accueilleront les 80 meilleurs joueurs français U18, c’est-à-dire Grenoble, Rouen, Angers et le regroupement HC74. Notre démarche est le résultat d’une stratégie bien pensée. Il faut créer dans notre discipline beaucoup plus d’adversité et d’émulation pour que nos joueurs ne soient plus apeurés au niveau international. Donc, en plus de ces quatre pôles espoirs, il y aura bien sûr l’apport indispensable de toutes les autres structures de formation de nos clubs. »