- BRIANÇON : AGONIE OU SIMPLE PASSAGE À VIDE ? - |
La date du
6 avril 2014 restera gravée à jamais dans l’histoire du club de
Briançon. Ce jour-là, un véritable séisme sportif a fait trembler les célèbres fortifications de Vauban et provoquer un enthousiasme mémorable parmi tous les habitants de la célèbre citadelle des Hautes-Alpes. Car dans cette ville moyenne de 12 400 âmes, le hockey sur glace est devenu depuis très longtemps une véritable tradition régionale.
La secousse fut si forte qu’elle a été ressentie jusque dans les chalets des deux stations de ski limitrophes de Serre-Chevalier et de Montgenèvre. L’onde de choc à coups de crosses s’est même propagée jusqu’à Puy-Saint-Vincent et Risoul !
Mais l’épicentre cet inoubliable « tremblement de glace » se situait dans la patinoire
René Froger qui porte le nom d’un ancien président du club mort en déportation pendant la seconde guerre mondiale. Ce dernier, qui fut également joueur, avait tant œuvré pour le développement du hockey sur glace à Briançon qu’il reçut, à juste titre, cet hommage posthume en 1994 lors de la commémoration du cinquantième anniversaire de la libération de la ville. Or, lors de ce fameux soir du
6 avril 2014, ce dernier a dû se retourner dans sa tombe !
UN TITRE UNIQUE ET HISTORIQUE
En effet, l’événement qui s’est produit voici tout juste dix ans à Briançon fut inédit et considérable ! Pour remporter le titre de champion de France dans la Ligue Magnus pour la
première fois de leur histoire, les « Diables Rouges » ont transformé ce jour-là leur patinoire en un véritable enfer incandescent. A tel point que les « Ducs » d’Angers, leurs malheureux adversaires, ont eu le souffle beaucoup trop court et les jambes coupées à une altitude de 1326 mètres. Car les Hauts-Alpins survoltés ont fait fondre la glace lors du septième match de la série finale en remportant
à domicile la Coupe Magnus sur le score sans appel de 5-1.
Le club de Briançon, qui avait déjà disputé en vain
trois séries finales de la Ligue Magnus dont deux successives (en 1988 contre le Mont-Blanc puis en 2008 et 2009 face à Rouen puis Grenoble), a ainsi réussi à atteindre enfin le sommet d’une autre sorte de « montagne » qui semblait jusque-là inaccessible. Si cette ascension jusqu’au titre suprême suscita un tel engouement à Briançon et dans ses environs, c’est parce que ce fut la réalisation d’un rêve sportif local qui a nécessité une attente interminable qui durait depuis exactement
80 ans !
Briançon a attendu si longtemps mais ça y est, le club haut-alpin décroche la Coupe Magnus !
L'EQUIPE DE BRIANÇON 2014
Gardiens : Ronan Quemener, Aurélien Bertrand et Corentin Lapointe.
Défenseurs : Sébastien Bisaillon (Canada), Gasper Cerkovnik (Slovénie), Florian Chakiachvili, Loic Chapelier, Richie Crowley (Etats-Unis), Thibaut Farina, Mathieu Jestin, Damien Raux, Viktor Szelig (Hongrie), Teddy Trabichet.
Attaquants : Jaka Ankerst (Slovénie), Marc-André Bernier (Canada), Pierre-Antoine Devin, Cédric Didio Balsamo, Matthieu Frecon, Bostjan Golicic (Slovénie), Jimmy Jensen (Suède), Denny Kearney (Etats-Unis), David Labrecque (Canada), Sébastien Rohat, Thybaud Rouillard, Lionel Tarantino.
Coach : Luciano Basile (Canada).
Assistant : Edo Terglav (Slovénie).
UNE FÊTE DE COURTE DURÉE
Malheureusement, au cours des mois qui suivirent cet événement sensationnel l’euphorie laissa vite la place à une grande désillusion au sein de la population. Car c’est une véritable
descente aux enfers progressive qui attendait le vieux club des Hautes-Alpes créé en 1934. La chute sportive fut si dure que ses effets néfastes perdurent malheureusement encore aujourd’hui. Car une fois que les clameurs se sont tuent l’équipe fanion briançonnaise fut victime d’une véritable dépression, dans tous les sens du terme. L’origine de cette dégringolade brutale fut le départ immédiat de son célèbre coach italo-canadien, le très charismatique
Luciano Basile (Photo ci-contre), qui était une sorte de Messi derrière le banc briançonnais depuis une décennie.
Ce dernier, avec un égo et un orgueil qui en imposaient, n’a pas voulu accepter une baisse de son salaire (5000€ mensuel plus un appartement) et commit par ailleurs l’imprudence de mélanger les genres sur le plan politique en prenant partie pour un camp lors des élections municipales locales.
Du coup, le nom de Luciano Basile se mit rapidement à circuler un peu partout, comme à Grenoble qui venait de se séparer de son entraîneur, mais aussi à Gap et dans d’autres clubs de l’hexagone. On évoquait également son nom pour reprendre éventuellement à l’époque la tête de l’équipe de France d’autant que le journal L’Equipe publia un article dans ce sens avec un titre très explicite :
« Basile rêve des Bleus ».
En attendant de rencontrer d’une façon informelle le président de la FFHG, Luciano Basile se rendit à Jaca, dans les Pyrénées espagnoles, afin de donner un coup de main à l’équipe nationale ibérique qui s’apprêtait à disputer le Mondial de la division 2. A l’âge de cinquante-quatre ans, le coach très envié de Briançon voulait se donner un peu de temps pour ne pas faire le mauvais choix.
La «
traversée du désert » du club de Briançon commença d’abord avec un pied-de-nez douloureux et très vexant puisque finalement le choix du fameux Luciano Basile, qui allait être élu à quatre reprises meilleur entraîneur de la Ligue Magnus, fut de « partir en beauté » et il décida donc de ne pas renouveler son contrat juste après le triomphe retentissant de son équipe. Comble de l’humiliation, ce « faiseur de miracle » allait jouer le rôle de Judas forcément mal ressenti à Briançon puisque Luciano Basile remporta à nouveau la saison suivante la Coupe Magnus, mais cette fois
avec le club voisin de Gap !
Sans faire de sentiment, le coach canadien arriva chez l’ennemi avec l’ancien capitaine de Briançon Eric Blais (en provenance de La Chaux de Fonds) et trois autres hockeyeurs briançonnais qu’il débaucha juste avant son départ : Loïc Chapelier, Cédric Guiberteau et Sébastien Rohat.
LA TRAVERSÉE DU DÉSERT
Pour tourner encore la crosse dans la plaie, lors de la saison qui suivit le titre historique de champion de France, le club professionnel de Briançon fut éliminé dès les quarts de finale par… Angers qui prit donc sa revanche de la fameuse finale. Mais la chute de l’équipe professionnelle briançonnaise, qui fut dirigée ensuite successivement par
Edo Terglav (photo ci-contre),
Patric Wener,
Alexis Billard puis
Claude Devèze, continua inexorablement à patiner sur place et à glisser jusqu’à redescendre définitivement et sans gloire de son piédestal.
En effet, en 2016 les Diables Rouges furent relégués en
Division 1 après avoir terminé seulement onzièmes au classement de la ligue Magnus. Il faudra patienter pendant trois saisons, disputées dans le relatif anonymat de l’antichambre des pros (2017, 2018, 2019), pour que l’équipe de Briançon puisse ressortir enfin la tête de l’eau et effectuer à nouveau son retour dans l’élite nationale en battant à trois reprises Neuilly-sur-Marne dans la série finale de la Division 1 sur les scores de 6-5, 2-0 et 4-2.
La mobilisation des forces vives locales, qui représentent malheureusement un trop petit « marché » à Briançon, si on inclut les élus et les partenaires, ne suffirent pas à faire revivre au club ses heures fastes d’antan. Car la bonne volonté des nombreux bénévoles locaux (qu’il faut saluer pour leur engagement désintéressé) n’a pu masquer une dure réalité économique pendant ces trois années de traversée du désert pendant lesquelles l’équipe des Hautes-Alpes a joué en Division 1.
Pendant ce « trou d’air » sportif la rigueur n’était plus la même dans les vestiaires et, preuve du malaise, pas moins de six entraîneurs se repassèrent rapidement la « patate chaude » pour essayer en vain de mettre un terme à cette spirale défaitiste : Patric Wener, Alexis Billard, Claude Devèze, Eric Medeiros, Daniel Sedlak et Ramon Sopko. Signe également de la fragilité de l’édifice, en 2021, l’ancien président Bernard Rouillard dût reprendre la direction du club amateur car il n’y avait pratiquement plus de jeunes joueurs dans l’école de glace locale. Depuis ce temps la réserve de Briançon a eu beaucoup de peine à se reconstituer en formant juste quatre ou cinq véritables espoirs pour pallier aux blessures des pros et du coup la profondeur du banc n’est toujours pas assez conséquente.
Car la SASP des Diables Rouges a été incapable de se « refaire une santé » et de résorber complètement ses dettes qui furent le prix fort à payer pour pouvoir remporter ce fameux titre national en 2014 puisque la somme du déficit avoisinait les 350 000 euros.
UN RETOUR DIFFICILE EN LIGUE MAGNUS
Depuis son retour dans la Ligue Magnus au mois de septembre 2019, le passage régulier devant la Commission Nationale de Suivi et de Contrôle de Gestion (CNSCG) n’a donc pas cessé d’être une épreuve difficile. Si le club de Briançon a toujours été validé, il a cependant demandé à plusieurs reprises
de quitter la Ligue Magnus à cause de son budget prévisionnel qui est actuellement - il faut le souligner - le plus petit du championnat de France élite avec seulement 1,067 million d’euros.
Comment lutter dans ces conditions à armes égales contre des clubs qui ont des budgets quatre fois plus élevés ? D’autant que lors de la saison 2019-2020 le retour dans la Ligue Magnus fut catastrophique puisque les Diables Rouges furent éliminés des play-offs pour avoir terminé à la 11
e et dernière place. Avant la pandémie en 2021, Briançon s’est arrêté à la 12
e place et les Diables Rouges restèrent ensuite inexorablement bloqués à la
dernière place du classement général de la ligue élite en 2022 et en 2023 !
Face à ce triste constat, la question d’un retour en Division 1 s’est légitimement posé. Dès le mois de décembre 2023, le Président
Guillaume Lebigot avait émis son souhait de repartir dans la division inférieure. Mais la FFHG ne l’a pas entendu de cette oreille. En l’absence d’un nouveau promu sportif volontaire en Division 1, le club de Briançon a été maintenu
automatiquement en Ligue Magnus malgré ses réticences.
Ce maintien forcé s’explique par le fait que la FFHG a voulu protéger la Ligue Magnus composée de 12 clubs et ne pas risquer d’organiser un championnat bancal à onze clubs seulement, voire réduit à dix. La Division 1 étant a priori complète et sans candidat sérieux pour la montée chez les pros de l’élite, le club de Briançon risquait donc, s’il restait intransigeant, de repartir en Division 2. Du coup, le président Guillaume Lebigot n’a pas voulu prendre ce risque.
Désireux de passer la main depuis plusieurs saisons, et malgré sa menace de démission exprimée si les résultats ne s’amélioraient pas, Guillaume Lebigot, est cependant toujours à son poste et ne se résout pas à envisager une « agonie » fatidique, tout comme son manager général
Christophe Lapointe. Le président des Diables Rouges, gérant de la société des « Chalets Bayrou » (nom de l’ancien maire de Briançon et président du club décédé en 2009 lors d’un accident de voiture), ne cache pas qu’il attend de partir « proprement » si un successeur se présente. Mais, pour l’instant, on peut comprendre que, vu les mauvais résultats et le contexte économique local difficile, les repreneurs ne se bousculent pas beaucoup à la porte de la patinoire de Briançon.
LA FORMATION LOCALE PRIVILÉGIÉE
Le président des Diables Rouges confie : « La petite équipe qui s’est reformée pour notre nouveau projet sportif nous a redonné un peu de moral. Tout comme les quelques matches à Noël et ceux qui ont suivi en championnat car malgré nos difficultés la patinoire reste bien remplie. Notre commission sportive, qui est composée de deux actionnaires,
Luc Rougny (ancien président) et
Antony Thillet, ainsi que de
Kévin Igier (ancien capitaine et nouveau directeur de la piscine-patinoire), a choisi de retrouver pour notre équipe senior
une identité briançonnaise. On essaye donc de rebâtir avec des jeunes hockeyeurs issus de notre formation locale comme Robin Colomban et son frère Bastien, Lucas Bonnardel, Dimitri Thillet, Gaétan Villiot ou encore Thomas Raby qui cherchent du temps de jeu et sont prêts à mouiller le maillot d’une ville où ils ont leurs racines. »
Csaba Szekely (coach adjoint) et Marton Vas (coach), ancien renfort étranger de Briançon, Martin Vas (44 ans)
Toujours bloquée cette saison dans le bas du classement malgré quelques victoires grâce à une réaction d’orgueil, l’équipe de Briançon, entraînée désormais par le Hongrois
Marton Vas (ancien joueur du club de 2006 à 2009) ne se fait pas d’illusion car elle ne dispose pas d’un fond de banc assez fort avec seulement neuf renforts étrangers et seize français dans son effectif. Les Diables Rouges tentent donc tant bien que mal de survivre en espérant des jours meilleurs.
Alors que le club de Briançon fête cette saison ses
90 ans d’existence, il est quand même difficile de le comparer avec son passé glorieux même si cette ville de montagne reste une véritable «
terre de hockey » comme me le confiait à l’époque l’ancien international Marc Peythieu, l’une de ses célébrités sportives locales qui fut pendant huit ans le fidèle assistant de l’ex-entraîneur des Tricolores, le suédois Kjell Larsson.
LA FIN D’UN PASSÉ GLORIEUX ?
L’ancien maire de Briançon
Robert Decaumont, qui fut également président du club, se vantait en 1990 dans un de mes articles publiés par le journal L’Equipe de posséder des moyens financiers importants. « Nous sommes le dernier village gaulois qui résiste !
», me disait-il à l’époque avec jubilation. Ce dernier, promu également
vice-président de la Ligue Elite (qui deviendra Ligue Magnus), fit sourire beaucoup de gens avec sa formule empruntée à la célèbre bande dessinée Astérix. Mais la situation de l’ancien Hockey Club Briançonnais (HCB) était beaucoup moins idyllique car son président-maire fut battu sans gloire aux élections locales et ne resta en place que pendant trois ans et quitta également son prestigieux poste fédéral.
Le club de Briançon
déposa son bilan à la fin de la saison 1991-1992. Un déficit de 9,2 millions de francs (1,4 million d’euros) était apparu au grand jour après la défaite du « président-maire » Robert Decaumont aux élections municipales anticipées. Celles-ci furent provoquées après la démission en bloc de dix-huit conseillers municipaux ! Car ces derniers refusaient que la ville des Hautes-Alpes accorde une rallonge de près de trois millions de francs (458 000 euros) pour aider le club de hockey sur glace local à verser des indemnités en retard à ses nombreux internationaux.
Du coup, le club fut contraint de redescendre alors en Division 3. Puis ce fut une lente remontée avec en 1994 un titre de champion de France la Division 3, un nouveau sacre national en 1995 dans la Division 2 et encore un titre de champion de France en 1997 dans la Division 1. Par la suite, les Diables Rouges continuèrent avec obstination leur belle remontée vers le plus haut sommet de l’élite jusqu’en 2014 où ils réussirent enfin à remporter la Coupe Magnus. Malheureusement, après ce coup d’éclat retentissant (car historique) les temps ont malheureusement bien changé ! Est-ce la fin définitive d’un passé glorieux ?
Malgré sa situation préoccupante, il est nécessaire de rappeler que le club de Briançon mérite le respect car il a été sacré champion de France dans toutes les divisions du hockey sur glace français de la Magnus à la Division 3 ! Mais il fut aussi vainqueur de la Coupe de la Ligue en 2012, vainqueur de la Coupe de France à deux reprises en 2010 et 2013 et il a participé à deux autres finales de la même compétition lorsqu’elles n’étaient pas encore organisées définitivement à Bercy mais dans la patinoire de la station de Méribel.
Par ailleurs, preuve que la ville de Briançon reste un grand bastion de notre discipline, elle a organisé dans sa patinoire de grands événements internationaux comme les Championnats du monde féminin de hockey en 2001 ainsi que trois Championnats du monde juniors masculins (U20 et U18) en 2002, 2003 et 2004. Sans oublier le tournoi de qualification senior pour les Jeux olympiques d'hiver de Turin en 2004, ainsi que deux tournois de « l'Euro Ice Hockey Challenge » en 2003 et en 2005.
Briançon vs Angers Finale de la Coupe de France
Briançon remporte, avec suspense, sa seconde Coupe de France et son troisième trophée en trois ans.
UN FIEF HISTORIQUE MALGRÉ TOUT
Faut-il rappeler également qu’un nombre très impressionnant de vedettes du hockey sur glace français ont porté à l’époque le maillot du club de Briançon. Je cite, juste de mémoire, plusieurs anciens internationaux comme Yvon Peythieu, Marc Peythieu, Patrick Peythieu, André Peloffy, Dennis Murphy, Michel Leblanc, Sylvain Beauchamp, Peter Almasy, Pierre Pousse, Bertrand Pousse, Pétri Ylonen, Benoît Laporte, Pascal Margerit, Michel Galarneau, Bruno Saunier, Georges Roul, Patrick Dunn, Taras Zytynsky ou encore Patrick Rolland.
Plus récemment, il y a eu également Loïc Lampérier, Julian Junca, Ronan Quemener, Florian Chakiachvili, Damien Raux, Teddy Trabichet, Cédric Di Dio Balsamo, Sébastien Rohat ou encore Lionel Tarantino. Mais, j’arrête là l’évocation de cette liste car elle serait trop fastidieuse à lire et elle est loin d’être exhaustive !
Que ceux qui ne sont pas cités ici me pardonnent. Mais tous ces noms célèbres prouvent bien que le club de Briançon, qui subit donc actuellement un passage à vide difficile, reste malgré tout
un fief historique important et très attractif du hockey sur glace français. Il ne faut donc pas qu’il passe en pertes et profits dans notre discipline au risque de le voir disparaître définitivement de la Ligue Magnus.
Comme c’est d’ailleurs le cas également du club voisin de
Gap, l’autre grand fief du département des Hautes-Alpes, victime lui-aussi d’une grosse baisse de régime tout aussi inquiétante en restant désormais dans le bas du classement. Or, le président
Jérôme Escallier a déclaré récemment : « Si on veut exister dans le hockey à Gap, on est absolument obligé d’être en Ligue Magnus ! »
Pour les « Diables Rouges » et les « Rapaces », le combat est donc le même actuellement, à savoir d’abord survivre en évitant une agonie qui serait à coup sûr mortifère, puis remonter ensuite la pente pour retrouver si possible leur lustre d’antan.
UN PRÉSIDENT GÉNÉREUX SAUVE LA MISE
Ce n’est pas le président
Guillaume Lebigot (photo ci-contre) qui me démentira puisqu’il n’y va pas par quatre chemins en me confiant : « La saison prochaine, comme il y a semble-t-il plusieurs clubs qui vont présenter un dossier de candidature pour monter dans la Ligue Magnus, il va donc y avoir des playdowns et forcément un des deux clubs du département des Hautes-Alpes devra retourner en Division 1. L’année suivante l’autre risquera d’y passer à son tour ! Depuis dix ans, je n’arrête pas de proposer à tout le monde de créer une fusion entre Gap et Briançon, mais je ne suis pas écouté. Si ce n’est pas le cas, il faut être réaliste, les deux clubs de notre région vont mourir, c’est une certitude ! Depuis que je suis président, j’ai mis tous les ans de ma poche
50 000 euros dans le club de Briançon ce qui fait au total
500 000 euros. Avec cette somme, j’aurais pu m’acheter un bel appartement sur la Côte d’Azur ! Ici, il n’y a pas d’usine, le contexte économique est trop restreint et notre sponsor majeur ne nous donne que
1500 euros. Dans ces conditions, sans une union de nos forces, on ne pourra plus jamais rivaliser avec les grands clubs beaucoup plus riches comme Rouen, Grenoble, Angers ou Marseille. Ils ont le grand avantage de posséder désormais des patinoires avec de grandes capacités. »
UNE FUSION POUR RÉSOUDRE LE PROBLÈME ?
Comme le confirme le président des Diables Rouges, la question que je pose volontairement dans le titre de ma tribune est donc malheureusement d’actualité. Que ce soit pour Briançon ou d’ailleurs pour Gap son proche voisin (distant de 88 kilomètres), assiste-t-on actuellement à
une agonie ou un simple passage à vide ?
Concernant le projet de fusion proposé avec insistance par Guillaume Lebigot, il part certes d’un bon sentiment et semble théoriquement logique sur le plan économique en cumulant deux budgets qui ont de la peine à dépasser chacun les 1,5 million d’euros. Mais, sera-ce suffisant et est-ce vraiment la solution miracle ? A titre personnel, je pense que c’est une fausse bonne idée.
Après l’expérience cuisante en 2016 des éphémères « Pionniers » de la Haute-Savoie qui ont regroupé très momentanément dans la Ligue Magnus les clubs de
Chamonix et de
Morzine, séparés par une distance pourtant plus courte de 70 kilomètres, cet échec prévisible au bout d’une saison seulement me laisse du coup très dubitatif. Surtout concernant l’engouement supposé que susciterait ce nouveau « mariage forcé » auprès des spectateurs potentiels qui existent dans les deux grands fiefs des Hautes-Alpes. Le hockey sur glace français peut-il se payer le luxe aujourd’hui d’avoir deux clubs professionnels de la Ligue Magnus dans un même département ?
Je rappelle un autre fiasco qui peut également servir d’exemple dans l’histoire du hockey sur glace français avec la très brève association contre nature entre
Grenoble et
Villard-de-Lans en 1966 qui dura finalement que deux saisons. Ce fut aussi le cas plus tard de l’ancienne fusion entre
Saint-Gervais et
Megève au pied du Mont-Blanc. Ceci dit, je me trompe peut-être cette fois et je souhaite très sincèrement que le futur me donne tort !
L’ancien hockeyeur de Briançon
Patrick Peythieu, qui travaillait au service des sports de la ville puis fut directeur de la patinoire pendant six ans, me suggère une autre solution qui serait en l’occurrence iconoclaste : « Je ne crois pas que les deux clubs soient vraiment irréconciliables, surtout s’il s’agit de leur survie malgré une rivalité ancestrale que l’on constate lors du derby local traditionnel qui suscite toujours beaucoup de passion dans notre région. Pourquoi ne pas imaginer par exemple que le club de Gap, qui a un budget un peu plus élevé malgré sa modestie, reste toujours en compétition dans la
Ligue Magnus et que le club de Briançon se contente de disputer le championnat de la
Division 1. De ce fait, mon club d’origine serait en quelque sorte le club réserve de Gap ce qui permettrait, avec un centre commun de formation et grâce aux licences bleues, des échanges pour faire évoluer des jeunes espoirs au plus haut niveau. Prendre l’exemple de Grenoble avec Chambéry et Vaujany. Mais encore faut-il que les susceptibilités et le chauvinisme de part et d’autre ne viennent pas empêcher ce mariage de raison entre les deux grands clubs de notre département… »
L’HISTOIRE DU SURNOM DES « DIABLES ROUGES »
Notre chroniqueur régulier
Tristan Alric, qui était à l’époque le spécialiste du hockey sur glace dans le journal sportif national L’Equipe, s’efforçait de donner des surnoms à tous les clubs de l’ancienne « Nationale A », qui est devenue depuis la « Ligue Magnus ». Dans ses articles son but était de rendre notre sport plus attractif pour le grand public. Concernant le club de Briançon, il expliqua un jour à l’ancien président Philippe Pacull : « Depuis le début de la saison je vois que vos joueurs se battent comme des diables. Ce n’est pas seulement les « Rouges » qu’il faut les surnommer comme c'est le cas actuellement, mais plutôt les
« Diables Rouges » ! Si vous êtes d’accord, je donnerai désormais régulièrement ce surnom beaucoup plus sympa et plus accrocheur à votre équipe dans mes articles. Vous devriez l’adopter également car sur le plan marketing car, à mon avis, ce serait plus vendeur. C’est ce que j’ai fait également en donnant le surnom des Jets à Viry-Châtillon car c’était un des rares clubs qui n’en avaient pas encore. »
Ayant eu l’accord du club, c’est ainsi que l’habitude fut prise peu à peu de désigner l’équipe de Briançon les « Diables Rouges », dans mes articles un surnom qui finira par être adopté officiellement par le HCB pour en faire son logo original et son image de marque promotionnelle.
Lorsque la Coupe Magnus est passée à l’époque à Briançon, notre chroniqueur Tristan Alric avait posé devant son fameux trophée à côté des jeunes espoirs du club des Hautes-Alpes et de Bernard Rouillard le responsable du hockey mineur.