HH : Vous avez repris l’équipe cette année, comment avez-vous préparé la saison ?
Rishi Ovide-Etienne : La mise en place a été un peu compliquée. Le partage des responsabilités et l’approche étaient différentes la saison dernière. On a dû trouver de nouveaux cadres, leur laisser le temps de prendre la mesure de leur rôle. A contrario, ceux qui postulaient pour ces responsabilités, mais à qui nous n’avons pas confié ce rôle de leader, ont dû l’accepter. Cela a pris pas mal de temps pour que chacun prenne sa place dans ce groupe. Il nous a aussi fallu ajuster notre recrutement et heureusement qu’on l’a fait sinon on courait à la catastrophe.
Comment votre groupe a-t-il vécu ce début de championnat difficile avec les défaites qui s’enchaînaient ?
Ca a été très difficile. On savait que la différence de niveau n’était pas si grande avec les autres, mais les weekends passaient et on voyait s’éloigner les autres au classement. Il y avait beaucoup de frustration. On avait aussi du mal à identifier clairement les raisons de cet enchaînement de défaites. Les gars s’entraînaient correctement, l’investissement et l’état d’esprit étaient irréprochables. Nous n’avions pas de « gros » joueurs, mais on avait installé un système collectif, notamment au niveau défensif, qui tranchait par rapport à la saison dernière. L’équipe a eu besoin d’un temps d’adaptation.
Pendant cette longue série de 10 défaites, comment avez-vous fait pour que le groupe n’éclate pas ?
On a beaucoup parlé, j’ai organisé des réunions, les joueurs se sont réunis entre eux. Il y a eu beaucoup de solidarité, on a vécu une aventure humaine énorme cette saison. 2-3 individualités ont pris leur rôle de leaders à bras le corps. Les joueurs ont pris conscience qu’ils devaient évacuer la peur de perdre. A force de perdre des matches d’un but, avec souvent le dernier but encaissé en fin de match, on commence à penser que c’est irréversible et on y pense en entrant sur la glace. L’équipe a réussi à évacuer ce sentiment pour se projeter vers quelque chose de beaucoup plus positif, l’envie de gagner.
Est-ce que le contexte a fait que des leaders ont émergé dans le groupe ?
Il est clair que nos deux recrues d’après le début de saison, Iloviita et Martin-Whalen nous ont fait énormément de bien. Martin-Whalen a une grosse personnalité, c’est un meneur d’hommes qui nous a beaucoup apporté. Iloviita, dans un autre style, plus discret, très discipliné, a été, lui aussi, important dans le redressement de l’équipe.
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Photographe : Dom Roux |
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Est-ce que vous avez identifié un tournant qui a fait basculer votre saison dans le bon sens ou est-ce la suite logique de la maturation de votre groupe ?
Le 1er déclic a été notre 1ère victoire à Annecy avec notre gardien n°2 dans les buts. Notre titulaire, Verlic, s’est blessé et ce n’est pas anodin. Il avait pris un gros coup au moral avec l’enchaînement de défaites. Et Hiret, qui n’avait pas joué depuis le début de la saison dernière, a répondu présent. A partir de là, les joueurs ont repris confiance et Verlic a été tiré vers le haut par cette nouvelle concurrence. Quand il est revenu de blessure, il a été énorme. Il fait une 2ème partie de saison phénoménale et nous permet de revenir dans la course au maintien.
Cette victoire intervient à la fin des matches allers, honnêtement tout le monde vous envoyait déjà en D2, quel a été votre rôle pour maintenir l’espoir ?
J’ai gardé tous les articles qui nous promettaient la D2. Ca a été une source de motivation. Vous savez, le sport c’est ouvert jusqu’au bout. On a eu de l’orgueil, du caractère. Ce qui a été très dur, c’est de commencer à enchaîner les victoires, mais de toujours rester dernier du classement à cause de notre retard. Il nous a fallu presque 2 mois pour ne serait-ce que recoller aux équipes qui étaient devant nous. Mes joueurs ont été très forts pour ne pas lâcher dans cette période. Je suis très fier d’eux.
En voyant votre remontée au classement, tout le monde a commencé à se projeter sur votre fin de saison qui vous voyait accueillir Annecy et aller à Montpellier, vos concurrents pour le maintien. Vous avez axé un travail particulier sur ces matches ?
C’est sûr que ce sont des rendez-vous qu’on a préparés d’une façon particulière. Le match contre Annecy, c’est le tournant de la saison. C’est la 1ère fois qu’on avait l’occasion de quitter la dernière place. On avait accompli un tel chemin, que ce match on l’attendait. Après, ça se joue à rien, aux tirs au but, au dernier tir au but. Notre avantage a été d’avoir un gardien meilleur que le leur. On méritait bien ce petit coup de pouce après tous nos déboires de la saison.
Ensuite, il vous restait cette « finale » à Montpellier, comment l’avez-vous abordée ?
C’était le match de la mort. Je ne me rendais pas compte du nombre de gens qui suivaient cette rencontre. Je l’ai mesuré en recevant tous les messages de félicitations après le match.
Il y a eu une différence importante entre les 2 équipes, c’est que nous avons joué le weekend avant ce match (contre Lyon) alors que Montpellier ne jouait pas. Ca nous a permis de garder le rythme, de l’intensité alors que la coupure a dû être difficile à gérer pour eux.
Ensuite, on a abordé la partie avec toute l’expérience de la saison et tout le chemin qu’on avait parcouru. Ca a été la grande différence entre Montpellier et nous. La pression qui existait sur ce match, on a vécu avec toute l’année. C’était un énorme avantage. J’ai vu le visage des joueurs de Montpellier quand ils sont sortis du vestiaire, il y avait une différence au niveau des attitudes et du stress. On était mieux préparé à jouer avec le stress et la pression.
J'ai aussi une pensée toute particulière pour mon homologue de Montpellier, Alexis Billard, dont c'était la 1ère année aux commandes, et qui ne mérite pas ça car je sais qu'il a réalisé un gros boulot avec ses gars cette saison.
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Photographe : Dom Roux |
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Vous parlez de pression, mais votre série de défaites ne vous a-t-elle pas enlevé toute pression, puisque tout le monde vous avait déjà condamnés ?
Il ne faut pas croire ça. On nous a enterrés très tôt, mais il y avait de la pression sur chaque match. C’était une question d’honneur. Il a fallu nous sortir les tripes pour se relever et prouver à tous qu’on avait notre place dans le championnat.
Est-ce que ce groupe, qui s’est construit dans la difficulté, n’est pas porteur d’espoir pour la saison prochaine ?
Oui et non. Il va falloir faire des changements. Même si c’était une aventure humaine énorme qui soude un groupe et les sensations après cette dernière victoire ont été aussi fortes que si on avait gagné un titre. Il y a eu beaucoup de stress et on sait que le stress use, on ne peut pas repartir sur les mêmes bases. Certains vont devoir aller évoluer dans d’autres structures pour vivre autre chose et nous on va devoir se renforcer, même si notre budget nous limite forcément.
Vous redécouvriez la D1 cette saison, est-ce que, comme beaucoup le disent, le niveau s’est élevé depuis votre dernier passage ? Est-ce que ça n’explique pas en partie vos difficultés de la 1ère partie de saison ?
C’est indéniable. Les matches sont vraiment durs et accrochés. Le championnat est juste énorme. C’est beaucoup plus homogène qu’avant. Là où on voyait 1 ou 2 gros blocs qui faisaient la différence, on voit aujourd’hui 3, voire 4, blocs de bon niveau par équipe. Notre problème a été à ce niveau-là, il nous a manqué de la profondeur de banc. C’est là-dessus que se font les différences cette année. Et compte tenu des équipes qui vont monter, ce sera encore plus compliqué la saison prochaine.
En conclusion, que retiendrez-vous de cette saison ?
Il est vrai qu'on a vécu les 2 extrêmes mais ce que nous retiendrons c'est ce fabuleux combat mené par les joueurs pour leur honneur, pour ça, je suis fier d'eux.
Pour conclure, je voudrais rendre un hommage particulier à mes assistants, kiné, doc, matériel, aux entraîneurs du mineur pour le boulot qui a été fait cette année ainsi qu’aux bénévoles qui nous font avancer en interne, mais également à nos supporters qui ont continué à croire en nous tout au long de la saison. L'équipe s'est aussi appuyée sur leur soutien dans les moments les plus difficiles.