Ton retour a tout d’abord été annoncé en France sans donner de destination dans l’immédiat, avec quelques espoirs de te revoir du côté de Rouen avec ton frère Marc-André.
Qu’est-ce qui te fait revenir en France et à Grenoble?
Depuis que mon club d’Odessa a cessé ses activités il y a quatre ans, j’ai essayé de revenir mais ça n’a pas fonctionné, soit pour des raisons familliales soit pour des raisons de contrat. Cela fait deux ou trois ans que je parle avec Jean-François Dufour à Grenoble, nous sommes restés en contact. J’ai toujours souhaité revenir en Europe, et la France était la meilleure place pour nous, surtout avec mes enfants qui sont assez grands pour voyager maintenant. Mon frère m’a mis en contact avec Edo Terglav, d’autant qu’on se connaissait un peu pour avoir joué contre lui en Junior ainsi qu’en France. On a parlé et on s’est entendus assez rapidement.
As-tu quand même envisagé de revenir à Rouen pour jouer aux cotés de ton frère Marc-André ?
On en a parlé, bien sûr. Quand Marc-André a signé avec les Dragons, j’ai pensé qu’il pourrait en parler mais ça n’a pas été plus loin que ça. J’étais déjà en contact avec Edo, puis Grenoble et Rouen sont deux grands clubs en Magnus. J’ai déjà connu Rouen et Grenoble était en haut de ma liste. Ce sera une nouvelle ville pour moi, ça va être le fun.
Marc-André est en France depuis 10 ans, tu as suivi son parcours avec Rouen et les nombreux trophées qu’il a accumulés avec les Dragons. Comment as-tu suivi tout ça à distance et est-ce que ça ne donne pas un peu envie de soulever quelques coupes ?
Oui, c’est mon frère jumeau, tous ses succès forcent le respect. L’année où j’étais à Rouen, on avait une bonne équipe, on a perdu en finale de la Coupe de la Ligue à Méribel, puis la ½ finale en play-offs, donc oui, je suis un peu jaloux. J’aurais souhaité être là avec lui pour célébrer, mais c’est le hockey.
Là, on va jouer l’un contre l’autre, ça va être différent d’autant que ce sera la première fois qu’on joue l’un contre l’autre. Ca a dû arriver une fois dans la ligue américaine pour un match hors concours, mais c’était sans importance. On n’en a pas encore parlé, mais ça va être fun.
Pourquoi as-tu quitté Rouen après ta première année ?
C’était pour la famille. En fait, je suis parti à Rouen pour jouer avec mon frère. J’ai adoré mon expérience à Rouen. Ma femme qui était ma fiancée à l’époque m’avait accompagné, et elle a adoré aussi.
A la fin de cette saison, un de mes très bons amis a acheté l’équipe d’Odessa et il m’a offert un très bon contrat pour revenir, et ma femme est d’Odessa également. On a pensé qu’il était mieux de rester aux Etats-Unis. J’ai parfois dit à ma femme qu’on aurait dû rester plus longtemps en France. Je suis très content de ma carrière aux Etats-Unis, mais encore plus content de pouvoir retourner en France.
Tu as connu les supporters de Rouen et de Magnus lors des déplacements. Comment sont les fans en CHL et en ECHL ?
Les gens au Texas sont très faciles et gentils. C’est ce qui m’a fait rester ici. Les gens étaient vraiment formidables avec moi. On avait un bon soutien à Odessa, mais rien de comparable avec la France comme à Rouen et Grenoble. Ces quatre dernières années, j’étais à Missouri (Kansas City). C’était peut-être les meilleurs supporters en Amérique du Nord, ça m’a fait penser aux supporters partout en France, même les petites villes ont des bons supporters. Les chants, les tambours, c’est vraiment spécial. Ce n’est pas comme ça ici aux Etats-Unis, mais c’est vraiment différent. Ca ressemble un peu à ce qu’on peut voir en NHL. Les gens viennent au match, mais sont très calmes.
La pression des tribunes, ça permet de donner plus, de jouer plus fort, c’est toujours bon.
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photo: Jean-Christophe Salomé |
Grenoble-Rouen, saison 2006-07 |
Qu’en est-il du niveau de jeu par rapport à ce que tu as connu en Magnus ?
J’ai toujours été très curieux de savoir ce que donnerait un match entre mon équipe de Missouri et Grenoble, Rouen, Briançon ou Angers. J’aurais bien aimé qu’on aille en France pour jouer quelques matchs. En ECHL, c’est plus physique parce que les patinoires sont plus petites. Il y a des joueurs en France qui seraient très bons ici, peut-être même parmi les meilleurs. Les deux premiers trios en France n’auraient aucun problème ici. Après, c’est très personnel, certains joueurs vont s’adapter très facilement alors que d’autres auront des difficultés, tout dépend de leur style.
Quand ton équipe de Missouri a intégré l’ECHL, as-tu ressenti une différence dans le jeu ?
Non, pas vraiment. J’ai plusieurs potes qui jouaient en ECHL qui m’ont dit que c’était un peu plus rapide. Les joueurs sont vraiment plus jeunes, 21/22 ans, avec des contrats, ils veulent progresser pour monter dans la Ligue Américaine. Ces joueurs là travaillent extrêmement fort, ils patinent vraiment partout. Globalement, c’était assez similaire à part le 3e trio qui était vraiment plus fort en ECHL, les équipes sont plus complètes avec plus de joueurs, les coachs avaient plus d’options.
Y’a t’il un gros écart de budget et de contrats entre la CHL et l’ECHL ?
Ici, on a un cap salarial. Il y avait une différence de 500$ par semaine de CHL en ECHL. En ECHL, c’est plus contrôlé, c’était un peu plus ouvert en CHL. Pour les plus vieux joueurs, c’était mieux aller en CHL, il y avait plus d’argent à faire qu’en ECHL. Pour la plupart des joueurs c’est la même chose.
Tu as atteint quelques records personnels en CHL (*), c’était un objectif ou c’est plutôt une satisfaction ?
Non, ce n’était pas un objectif. Personnellement, si je performe, ça aide l’équipe à gagner. J’ai passé le cap des 1000 points, c’est quelque chose que je regarderai avec un peu de fierté quand je vais me retirer, mais ça n’a aucune importance pour moi.
(*) 2e avec 609 assistances et 3e avec 919 points en CHL
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photo: Missouri Mavericks |
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Parlons un peu de Grenoble, as-tu suivi le recrutement et connais-tu quelques joueurs de l’équipe ?
Quand j’ai commencé à parler avec Edo, j’ai regardé un peu ce qui se passait. Edo m’a parlé des joueurs qu’il avait signés et ce qu’il voulait faire avec moi. Je ne connais pas vraiment tous les joueurs. Je connais Eric Chouinard, on a joué contre en Junior. Je connais les autres Québécois de nom, la plupart on de bons CV en Ligue Magnus, ça va être excitant.
Quel a été le discours d’Edo Terglav ?
Il connaît mon style, et il veut que j’amène ça à Grenoble. Comme mon frère, je suis plutôt un fabricant de jeu et Grenoble a signé des joueurs qui peuvent mettre le palet dans le filet. Mon rôle sera de les distribuer, et j’aime marquer aussi. C’est ce que veut Edo, que j’amène mon expérience et mon leadership, et aider l’équipe à aller le plus loin possible.
Grenoble va jouer la CHL avec des matchs dès le mois d’août. Qu’en penses-tu ?
Je pense que c’est une très belle préparation. Quand j’ai commencé à parler avec Edo, je n’avais aucune idée de la coupe d’Europe. Il m’en a parlé pour peut-être m’aider à signer, mais je suis vraiment excité. C’est très bon pour la Ligue Magnus et pour la ville de Grenoble. On va jouer du gros hockey contre de bonnes équipes. Oui, ce sera tôt dans la saison, ça va être très motivant. On va vouloir gagner, mais ça va être dur. On ne sait jamais, dès qu’on monte sur la glace, tout peut se passer.
Avec Rouen, on avait joué en République Tchèque contre Ostrava et Vitkovice. Après, ils nous avaient peut-être pris à la légère, et on a eu une ou deux victoires, on les avait surpris. Ca peut faire le même effet avec Grenoble, on ne sait jamais. C’est tôt, mais ça va élever notre niveau de jeu et on va arriver très bien préparés pour la Ligue Magnus.
Comment vas-tu effectuer ta préparation estivale ?
Il faut arriver en forme à Grenoble. Après, ce sera un peu différent pour moi, j’ai l’habitude de démarrer plus tard en octobre, je commence mes entraînements plus tard. Depuis que j’ai signé avec Grenoble, je suis retourné au gymnase, j’ai un programme et je vais essayer d’être dans la meilleure forme possible pour arriver prêt à Grenoble. C’est toujours mieux d’arriver avec un entraînement et que ça ne te prenne pas 2 ou 3 semaines pour être en forme. J’ai patiné un peu à Missouri, c’est un peu plus compliqué ici au Texas. Je vais au Québec dans 2 semaines, je vais aller patiner deux ou trois fois par semaine avec mon frangin.
Tu parlais de ton expérience et de ton âge, est-ce que tu as déjà pensé à ta reconversion ?
J’ai déjà commencé à y penser, je me suis posé beaucoup de questions mais je n’ai pas trouvé de réponses. On y pense avec la famille, mais on ne sait pas vraiment où on veut habiter. Ce serait plus facile au Texas, j’ai beaucoup de contacts. Tout le monde me demande si j’aimerais rester dans le hockey comme coach par exemple. C’est toujours une option. Pour l’instant, je vois au jour le jour.
Quel est ton favori pour la Coupe Stanley ?
Tampa a battu mes Canadiens, ça me fait un peu mal au coeur. A Chicago, je connais Vermette qui était mon centre en Junior à Victoriaville, ce serait bien qu’il gagne. Je dirais Chicago en 6 matchs. Je voyais plus Anaheim au début.
J’aurais bien vu Montréal passer un tour de plus que l’an passé, mais je ne les voyait pas battre les Rangers. Ils ont manqué d’attaque cette année. Leurs 3e et 4e trios ont compté de très gros buts, c’est peut-être ça qui les a aidés. Défensivement, ils sont bien, et Price est le meilleur gardien de la ligue. Ils ne sont pas très loin.
Deux Français ont joué en NHL cette saison, Pierre-Edouard Bellemare aux Flyers et Antoine Roussel à Dallas. Les as-tu suivis ?
J’ai un peu plus suivi Roussel. Etant au Texas, je ne suis pas très loin de Dallas. Il m’a toujours fait un peu rire avec son jeu, il joue très très bien, c’est une peste, il joue son rôle à merveille. Je n’ai pas trop suivi Pierre-Edouard, mon frère a joué avec lui, mais il est parti en Suède l’année où je suis arrivé. Il a joué tous les matchs et il est apprécié là-bas.
Pour conclure, veux-tu passer un mot en particulier ?
Pour les fans de Grenoble, je suis vraiment excité de jouer pour eux. Lors de mon année à Rouen, quand j’avais joué à Grenoble, j’étais vraiment surpris des supporters. J’ai beaucoup d’amis qui ont joué à Grenoble et je n’ai jamais entendu de mal. Ils sont peut-être exigeants comme à Rouen mais j’aime ça. Je suis vraiment content d’emmener ma famille là-bas. Mes deux garçons vont jouer au hockey mineur à Grenoble.
Pour les fans de Rouen, quand mon retour a été annoncé en France, beaucoup de fans de Rouen m’avaient écrit et espéraient que j’aille jouer pour eux. Ils ont vraiment été gentils avec moi lors de mon année à Rouen, il y a un respect mutuel, j’irai les voir quand on ira jouer à Rouen.