Christophe, les Jokers entament leur 5^ème saison en ligue Magnus, compte tenu du déroulement des précédentes, est-ce une saison piège ?

Non, je ne le pense pas. En tous les cas ni plus ni moins que les précédentes. Finalement elles le sont toutes un peu, surtout pour une équipe comme la nôtre. En effet, si nous mettons en perspective les moyens dont nous disposons et les résultats que nous avons obtenus ces dernières années, je pense que sous avons été quelque part en surrégime et nous surperformons un peu. Pour nous, et probablement plus que pour certaines autres équipes, il n’y a pas de vraie marge de manœuvre et il faut absolument que toutes les planètes s’alignent, notamment l’absence de blessés et que la mayonnaise prenne correctement dans le vestiaire, pour parvenir à rééditer ce niveau de performance d’année en année. Le fait que tous ces éléments se mettent en place et que tous les indicateurs soient au vert ne se décrète pas ni ne se maitrise totalement. Nous sommes donc toujours à la merci qu’une saison ne se déroule pas aussi bien que prévu et que nous y soyons moins performants. Evidemment, nous travaillons d’arrache-pied pour éviter cela. Notre objectif reste de nous présenter match après match pour les gagner, sans partir vaincus d’avance mais au contraire avec la volonté de nous y battre pleinement. Nous verrons bien où cela nous mène à la fin de la saison.

Photo : Laurent Maucec

Christophe Cuzin (Jokers de Cergy-Pontoise)

Justement, mis à part la saison d’accession qui a été tronquée en raison de la crise sanitaire, mais où les Jokers ont su néanmoins finir à la 5^ème place, ils ont ensuite, à chaque fois, non seulement pu se qualifier pour les play-offs mais aller jusqu’en demi-finale. En ayant mangé ce pain blanc, la communauté des Jokers, peut-être pas les joueurs ni le staff mais les suiveurs, y a probablement pris gout et voit ce dernier carré comme un objectif plancher naturel ?

Effectivement, l’environnement des Jokers s’est habitué à ce niveau de performance, que nous sommes fiers d’avoir pu leur démontrer, et attend certainement de nous voir le renouveler. N’aillez crainte, en interne nous savons pertinemment que les cartes sont rebattues, les compteurs réinitialisés et qu’il faut repartir de zéro.

Repartir de zéro, pas tant que ça puisque l’effectif a été largement reconduit, notamment derrière. L’incertitude plane donc plus sur l’attaque puisque les routines et schémas de jeu sont déjà réputés assimilés du côté de la défense. Le contenu des matchs de préparation, à défaut de leurs résultats, n’est-il pas porteur d’espoirs ?

Oui je le pense. Effectivement, nos gardiens et notre défense restent identiques et devant nous avons essayé d’apporter du leadership. D’une façon générale, nous avons essayé de renforcer un peu notre profondeur. Mais de toute façon, il faut remettre la machine en route, même avec les anciens joueurs, et les matchs de présaison sont là pour cela. Aujourd’hui ils nous permettent d’aborder avec confiance la nouvelle saison.

L’équipe est-elle prête et au niveau attendu pour ce début de saison ?

Honnêtement pas tout à fait, notre préparation a été plus que compliquée et fatigante. Organiser tardivement une tournée (ndlr : TF1 occupant l’Aren’ice pour le tournage d’un jeu télévisé, les Jokers ont dû s’expatrier le temps de leur préparation) n’a pas été simple. Nous n’avons pas pu optimiser cette période de préparation et pour en avoir récemment encore discuté avec les coachs, il nous manque un peu de séances sur notre glace principale. La préparation n’a pas été optimale mais cela va le faire. Je dois reconnaitre que la victoire à Angers pour notre dernier match de préparation a fait du bien à tout le monde. Donc tout n’est pas au top et Miika et Kevin (ndlr : Miika Elomo et Kevin Da Costa coach et coach-adjoint) en ont bien conscience mais ils ne sont pas inquiets. Nous poursuivrons normalement notre fin de préparation et notre montée en puissance.

En parlant de montée en puissance, il faudra qu’elle soit rapide car le calendrier vous prévoit une copieuse entrée en matière ?

Il est certain que cela part très fort. Avec la réception de Grenoble, d’Angers et de Rouen, le champion en titre, le tout entrecoupé des déplacements à Marseille et Amiens qui seront loin d’être simples, le début de saison va être chaud. De toute façon, aucun match ne sera facile et la saison va être encore palpitante.

Donc il ne faut pas être inquiet, même si l’équipe enregistre d’emblée quelques contreperformances ?

Pas du tout car la saison est longue, et même sans parler de contreperformance, simplement tomber devant plus fort que soi le jour du match cela fait partie du sport. N’oublions pas que l’an dernier nous avons gagné la moitié de nos matchs ce qui signifie aussi, a contrario, que nous en avons perdu tout autant. Déjà, si nous refaisons la même chose cette année, ce ne sera pas si mal.

De toute façon, avec la frustration liée à l’absence de match à la maison pendant la préparation, vous avez le soutien garanti de la communauté hockey qui gravite autour des Jokers à Cergy, et c’est plutôt de bon augure pour le taux de remplissage de la patinoire pour ces très belles affiches ?

Franchement, je n’en sais rien car c’est une situation inédite pour nous. Ce que nous avons toujours vécu c’est que lors de la reprise il faut à chaque fois se rappeler au bon souvenir des gens et montrer que l’on existe. Nos taux de remplissage commencent toujours bas et augmentent avec la saison qui avance. Chaque année nous repartons certes de moins en moins bas mais c’est un fait. Alors la présaison est un bon moyen de faire ce rappel à notre public or, cette année, nous en avons été privés. C’est donc un starter en moins. Ces matchs nous donnent aussi l’occasion de nous roder en termes d’organisation. Bref, nous verrons bien car, bien sûr, la frustration pour le noyau dur de notre fan base est réelle et je n’ai pas d’inquiétude quant à sa présence dès le premier match, mais pour les autres c’est l’inconnu. L’an dernier en ouverture contre Grenoble nous avions fait, de mémoire, 2300 personnes. Cette année ferons-nous mieux voire seront nous sold-out, je n’en sais rien ? Il y aura du monde c’est certain (ndlr : finalement le match attirera plus de 2900 personnes) mais la même affiche à noël et nous jouons à guichet fermé.

D’ailleurs pourquoi jouer le samedi ?

Ça c’est une tradition pour les mêmes raisons de réamorçage de la pompe, un peu aussi comme un rappel de la D1 où il est plus facile d’attirer du monde notamment des familles le samedi. C’est pour ça que nous commençons systématiquement la saison le samedi avant de reprendre ensuite le rythme et le calendrier de la ligue avec les matchs les mardis, les vendredis et parfois les dimanches.

Sinon, pour revenir à l’équipe est-ce que les difficultés de l’an dernier n’avaient pas aussi contribué à la galvaniser alors que cette saison il n’y aura, heureusement, plus ce ressort ?

Je ne le pense pas. En revanche, il avait permis peut-être d’exprimer et d’affirmer une certaine force de caractère. En ne prenant pas en compte ce contexte, il n’y a pas eu de ressentiment à son sujet. L’état d’esprit c’était plutôt « OK nous partons avec un déficit de 6 points, dont acte, c’est ainsi, maintenant pas de lamentations, place au jeu, on joue et on gagne nos matchs ». En même temps, il n’y avait pas, non-plus, d’injustice dans cette sanction, mais une réalité économique. Celle-ci a impactée nos choix sportifs mais elle a rapidement été annoncée à tous, nous n’avons pas caché la poussière sous le tapi, et comme cela a été pleinement assumé, cela n’a pas eu plus d’importance que ça.

Aujourd’hui l’ambition d’améliorer encore et toujours l’équipe a-t-elle été atteinte ou est-ce trop tôt pour le dire ?

Nos caractéristiques et principes de jeu sont les mêmes que l'an dernier, et nous avons privilégié des joueurs rapides, intelligents, qui sont réputés comprendre et être capables de s’inscrire dans les systèmes de jeu de Miika et surtout, ce sont des gars d’équipe. Après, comme chaque année, la mayonnaise prend ou pas. Pour l’instant cela à l’air de marcher dans le vestiaire, nous y verrons plus clair après quelques matchs et surtout après des matchs ou malheureusement nous aurons perdu car c’est dans ces moments que les personnes se révèlent complétement. C’est au pied du mur que l’on voit le maçon.

Il y a des jeunes qui semblent s’affirmer, le confirmez-vous ?

Oui nous avons un effectif composé de pas mal de jeunes et, là aussi ce n’est pas simple pour eux. Ils doivent continuer à travailler et confirmer car, comme je le dis souvent, le plus dur ce n’est pas d’arriver en haut c’est de s’y maintenir. Nous estimons que nos jeunes joueurs ont un sacré potentiel, nous en sommes persuadés mais il leur faut nous le démontrer et rester à la hauteur des espérances. Il ne faut pas, non plus, leur mettre une pression excessive et les griller bêtement. C’est une question de dosage fin entre notre niveau d’exigences et leur préservation. Nous essayons de faire le maximum pour que les conditions générales de travail qui leur sont proposées leur garantissent le plus de sérénité possible. Encore une fois, il ne faut pas exploser en vol à cause d’une pression à outrance, que ce soit les joueurs comme le staff. Je ne crois personnellement pas à la surpression. Le hockey est un sport d’émotion et de cardio. Toutes ces personnes à qui nous demandons de mettre du cœur à l’ouvrage, dans tous les sens du terme, nous devons les rassurer, ne pas les stresser ni provoquer une surconsommation émotionnelle inutile.
 
Revenons aux objectifs sportifs, le principal cette année est-ce l’accession aux play-offs ?

C’est avant tout de gagner le plus de matchs possibles ce qui devrait nous permettre d’y accéder. En revanche, ce serait bien d’aller chercher une performance en coupe de France. Pour une fois, nous avons un effectif fidélisé et je pense que c’est l’une des conditions pour performer et faire un bon parcours en coupe. Ce n’est évidemment pas la seule mais c’est un plus. Quand tu repars à zéro, le temps que tout soit pleinement en place tu arrives à l’automne et, il n’est pas rare que tu te sois fait prématurément sortir de la compétition avant. Normalement nous devrions aller plus vite en termes de cohésion donc nous avons peut-être une opportunité d’écrire un parcours inédit pour nous en coupe.