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Hockey sur glace - Ligue Magnus
L’INCROYABLE CARRIÈRE DE « PI-ED » BELLEMARE
 
Le retour de Pierre-Edouard Bellemare en équipe de France est un événement car ce sera un renfort de poids pour les Bleus pendant le mondial élite. Tristan Alric, créateur de la Coupe Magnus, raconte la carrière exceptionnelle et exemplaire de ce hockeyeur français qui se poursuit depuis plus de trente ans.
 
Media Sports Loisirs, Hockey Hebdo Tristan Alric le 02/05/2024 à 11:00
Tribune N°88

 
 
L’INCROYABLE CARRIÈRE DE « PI-ED » BELLEMARE


Lors des Championnats du monde qui débuteront dans une semaine à Ostrava en République tchèque Pierre-Edouard Bellemare sera à coup sûr très motivé. D’autant qu’il fêtera son grand retour chez les Bleus après sept ans d’absence ! Autant dire une éternité pour le célèbre attaquant numéro 41. Car ce dernier a toujours aimé porter le maillot tricolore. Il l’a encore prouvé en 2017 lors son dernier tournoi mondial disputé à Paris. A cette occasion, l’ex-attaquant des Philadelphia Flyers en avait profité pour atteindre le cap des 60 matches disputés avec l’équipe de France.
Combattant infatigable, le temps qui passe ne semble pas avoir de prise sur Pierre-Edouard Bellemare. Du coup, le sympathique international voudra démontrer une fois encore, qu’à l’âge de 39 ans, il conserve toujours de beaux restes sur la glace. Le « comeback » de notre plus célèbre vétéran tricolore sera donc suivi avec beaucoup d’intérêt par tous les observateurs et ses nombreux fans.
Si je ne doute pas de son apport positif pour l’équipe de France, c’est parce depuis le début de sa carrière, Pierre-Edouard Bellemare ne cesse d’effectuer un parcours sportif exemplaire et d’une exceptionnelle longévité, qui plus est à un très haut niveau. C’est pour cette raison que j’ai un grand respect pour ce hockeyeur dont tout le monde loue, à juste titre, sa gentillesse et sa fidélité.

 
TOUT A COMMENCÉ À MONTPELLIER


Né au Blanc-Mesnil en Seine-Saint-Denis, fils d’une mère franco-américaine originaire de Bretagne et d’un père martiniquais (très rapidement absent), le jeune Pierre-Edouard n’est pas resté longtemps en région parisienne. C’est ainsi qu’avec son frère aîné Geoffroy-Alexis (ancien hockeyeur) et ses trois sœurs, ils descendirent un jour dans la sud pour habiter provisoirement dans le quartier populaire de La Paillade à Montpellier. Si sa sœur Aurore-Annick pratiqua également le hockey, son autre sœur, la cadette Rose-Eliandre, née à Montpellier, est devenue également célèbre plus tard dans le sport français puisqu’elle a participé aux JO de Pékin de 2008 en tant que gymnaste avant de devenir coach sportif.
Un dirigeant du MHC, Maurice Ramos, ému par la condition sociale précaire de son frère Pierre-Edouard Bellemare, le prit rapidement en sympathie dès 1991 et le plaça sous son aile au même titre que son propre fils Bertrand Ramos lui aussi hockeyeur, pour les aider à progresser ensemble dans un contexte matériel plus favorable.
Le regretté Charly Freby, qui animait les séances publiques avec des courses de vitesse spectaculaires dans la patinoire de Montpellier, ainsi que le joueur-entraîneur Michel Moussol, décidèrent de « dégrossir » le petit métis âgé de 6 ans à peine avec des méthodes non conventionnelles. « Je me souviens qu’ils me faisaient patiner sans palet ce qui me rendait fou ! » confia plus tard avec amusement Pierre-Edouard Bellemare.
 

ITINÉRAIRE D’UN ENFANT PAS GÂTÉ


Après un bref séjour dans l’ancienne patinoire montpellieraine située face au zoo de Lunaret (aujourd’hui détruite et remplacée par celle de Vegapolis à Odysseum), le futur attaquant de l’équipe de France continua ensuite son apprentissage de jeune hockeyeur dans deux villes sudistes voisines, d’abord à Nîmes dans le Gard puis en Avignon dans le Vaucluse avant que sa famille nombreuse décide de déménager pour revenir dans la région parisienne. Pierre-Edouard Bellemare habita alors dans une nouvelle cité sensible, à Pantin en Seine-Saint-Denis, tout en suivant ses études dans un collège de Saint-Maur dans le Val-de-Marne et en allant jouer au hockey sur glace dans l’Essonne sur la patinoire de Viry-Châtillon.
Paradoxalement pour Pierre-Edouard Bellemare, c’est une lueur d’espoir qui continue à grandir dans son esprit. Etant le troisième des cinq enfants d’une famille monoparentale de Pantin, il se retrouve dans des vestiaires avec des camarades qui n’ont pas connu sa galère : « C’est sûr, ça fait un joli bout de chemin pour un enfant du 9-3 » dira en plaisantant Pierre-Edouard au cours d’une interview accordée à France TV. « Je me souviens, je partais avec ma crosse de Saint-Ouen pour Saint-Maur avant d’arriver à Viry-Châtillon pour m’entraîner. Trois heures de métro ! Avec, parfois, des contrôles d’identité et des policiers qui me demandaient pourquoi j’avais une arme en regardant ma crosse ! En fait, ce contexte parfois humiliant m’a aidé, ça m’a forgé un côté positif. Je profite de chaque moment et dans les équipes, j’ai souvent le rôle d’assistant capitaine. J’ai la pêche tous les jours, je profite, je pense toujours de manière positive sans me plaindre. »
C’est à partir de là que ses années d’itinérances et de « vaches maigres » allaient enfin s’achever. Car Pierre-Edouard Bellemare, jeune hockeyeur adolescent, qui portait toujours à ses débuts le numéro 4, commença à écrire les premières pages de son incroyable histoire. Un roman que son célèbre homonyme, l’ancien écrivain et animateur de télévision Pierre Bellemare, aurait eu à coup sûr voulu raconter. Tout cela grâce au soutien sans faille de sa maman Frédérique (ceinture noire de karaté), qui lui imposa dès le début une éducation stricte qui lui sera très bénéfique. « Le vrai héros de mon histoire c’est ma mère ! c’était maman warrior ! » confia-t-il.


L’ÉCLOSION AVEC LES DRAGONS DE ROUEN


En 2002, à l’âge de 17 ans, Pierre-Edouard Bellemare fit ses premières apparitions dans la Ligue Magnus avec l'équipe professionnelle des Dragons de Rouen en jouant une dizaine de rencontres avec des coéquipiers célèbres à l’époque comme Franck Pajonkowski, Arnaud Briand ou encore le capitaine Eric Doucet. Parallèlement il continua à évoluer également avec l'équipe junior du club de Rouen. Ce fut le début de son ascension comme jeune joueur professionnel qui durera au total quatre saisons dans la ville de la Seine-Maritime.
Car à Rouen, Pierre-Edouard Bellemare commença à garnir son palmarès en devenant d’abord champion de France de la Ligue Magnus en 2003. Il fut également élu meilleur espoir français de la Ligue en 2005. Puis, son standing de joueur continuant à s’élever puisqu’il remporta un deuxième titre de champion de France en 2006 avec cette fois des coéquipiers de talent comme le capitaine Daniel Carlsson, Julien Desrosiers, Carl Mallette, Olivier Coqueux ou encore Marc-André Thinel.
Mais Pierre-Edouard Bellemare continua à enrichir encore son palmarès en remportant deux fois la Coupe de France. Inévitablement ses belles prestations sur la glace ne passèrent pas inaperçues et il commença à être très sollicité. De plus, son désir de partir pour continuer sa progression le poussa à s’expatrier à l’étranger.


SA RAPIDE PROGRESSION EN SUÈDE


C’est ainsi qu’en 2006, Pierre-Edouard Bellemare, qui n’avait que 21 ans, va disputer pendant trois saisons le championnat « Allsvenskan » qui est le deuxième niveau de hockey sur glace en Suède avec le club de Leksands. Il décida de choisir la Suède car ce pays était à l’époque champion du monde et le champion olympique de hockey sur glace. Très récemment, le journal L’Equipe consacra une page entière sur cette période de la carrière de Pierre-Edouard Bellemare grâce à mon confrère Yann Hildwein qui intitula son article « La revanche du « Fucking French Guy ».
A cette occasion Pierre-Edouard Bellemare confia : « Je ne parlais ni suédois ni anglais et j’étais un asticot par rapport aux autres, dernier à tous les tests physiques. Les autres joueurs se foutaient de ma gueule. L’entraîneur m’appelait « Fucking French Guy (putain de français). Mais je me suis accroché. J’ai appris deux langues en quelques mois. Je me suis entraîné comme un débile. J’ai pris huit kilos de muscles et le regard des autres a changé. J’ai voyagé à travers l’Europe en évoluant au sein d’équipes nationales avec des joueurs de mon âge. C’est à ce moment-là que j’ai vécu du racisme dans le sport. J’avais déjà 14 ou 15 ans quand j’ai commencé à aller dans des pays de l’Est qui n’avaient pas vu beaucoup de gens noirs, a raconté Bellemare. Heureusement ça a changé aujourd’hui. Mais à l’époque, c’était bizarre d’être la cible d’insultes racistes alors que je n’étais même pas certain de ce qui se passait. »


CHAMPION NATIONAL À DEUX REPRISES !


En effet, Pierrre-Edouard Bellemare ne se découragea pas puisqu’il devint le meilleur buteur de la Division 2 suédoise, ce qui lui permit de jouer ensuite pendant cinq saisons consécutives en Svenska Hockeyligan (en SHL de 2009 à 2014), avec le célèbre club suédois de Skellefteå AIK. A cette occasion l’attaquant international tricolore fut sacré champion de Suède en 2013 et 2014. Il rentrera ainsi dans le groupe très prestigieux des hockeyeurs français devenus champions nationaux à l’étranger comme par exemple Christophe Ville, Christian Pouget, Philippe Bozon, Denis Perez, Cristobal Huet, Stéphane Barin, Sacha Treille ou encore plus récemment Yohann Auvitu.
Inutile de dire que ces deux titres de champion en Suède furent un nouveau tremplin dans la carrière de Pierre-Edouard Bellemare qui était du coup très suivi par les recruteurs du continent nord-américain.


UN RÊVE QU’IL N’AVAIT PAS IMAGINÉ AUX ETATS-UNIS


En effet, les Blackhawks de Chicago furent les premiers à montrer de l’intérêt pour Pierre-Edouard Bellemare, mais rien ne s’était concrétisé en raison d’une blessure à une hanche et au pelvis qui l’avait obligé à disputer seulement 29 matchs en Suède au cours de la saison 2012-2013. Mais, un an plus tard, avec l’équipe de France, lors des Championnats du monde 2014 à Minsk en Biélorussie, Pierre-Edouard Bellemare, qui formait un trio exceptionnel avec Stéphane Da Costa et Antoine Roussel, a inscrit le but décisif 3-2 contre le Canada dans la poule préliminaire.
Un coup d’éclat qui lui valut d’être à nouveau très courtisé. Le Français, qui bénéficie d’un bon physique (1,82 mètre et 90 kilos), engagea alors des discussions avec les Canadiens de Montréal, mais c’est par la suite un appel téléphonique venu d’un dirigeant des Flyers de Philadelphie qui suscita son plus grand intérêt. En effet, jouer pour une équipe américaine avait des avantages car les Flyers lui proposaient de jouer un rôle bien précis sur la glace de centre-ailier plutôt défensif avec ou sans palet, une fonction qui était aussi importante pour le club que pour lui. De plus, son épouse Hannah possède la double nationalité suédoise et américaine, elle n’avait donc pas besoin d’un visa pour travailler aux États-Unis.
 

IL A JOUÉ DANS CINQ CLUBS DE LA NHL


C’est ainsi que Pierre-Edouard Bellemare débuta son incroyable carrière très inattendue dans le prestigieux circuit de la NHL en jouant d’abord pendant trois saisons avec les Flyers de Philadelphie (2014 à 2017) portant pour l’occasion le maillot numéro 78. Il rejoignit à l’époque dans le circuit Antoine Roussel le seul français encore présent qui évoluait chez les Stars de Dallas depuis deux saisons.
Pour l’anecdote, Bellemare marqua son premier but dans la NHL le 22 octobre 2014 face aux Penguins de Pittsburgh. Il faut préciser que débuter à ce niveau à l’âge de 29 ans, avec le rôle paradoxal d’un rookie, est un cas rarissime dans la ligue nord-américaine puisque l’âge maximum est théoriquement de 28 ans !
Ayant bénéficié de cette opportunité le Français confiera : « Je me suis plutôt bien intégré et ce qui m’a aidé paradoxalement c’est mon âge car j’avais plus de recul sur la vie. Et le fait que je parle trois langues (Suédois, Français et Anglais) ça m’a permis de parler avec pas mal de joueurs différents dans le vestiaire et de m’en faire des amis. » Il sera très apprécié dans l'équipe américaine de Pennsylvanie au point de devenir « assistant capitaine » lors de sa dernière année chez les Flyers au mois de mars 2017 après le départ de Mark Streit qui fut échangé au Lightning de Tampa Bay. D’autant que Pierre-Edouard Bellemare, qui ne cache pas qu’il a toujours été un joueur « assez bruyant dans les vestiaires », allait s’infliger à lui-même une discipline stricte tout en effectuant une nouvelle « mue » pour s’adapter encore d’avantage au jeu spécifique de la NHL. C’est ainsi que de leader habituellement offensif, il devint par nécessité un attaquant plutôt défensif spécialiste des infériorité numériques. Finalement, au cours de ses trois saisons passées avec Philadelphie, Pierre-Edouard Bellemare disputa au total 81 matches (2014-2015), puis 74 matches (2015-2016) et encore 82 matches (2016-2017) qui fut son record.

 
IL A UNE RUE QUI PORTE SON…DOUBLE PRÉNOM !


À l’issue de son expérience avec les Flyers, Pierre-Edouard Bellemare déclara prendre chaque match comme si c’était le dernier. Pourtant, le 21 juin 2017, il débuta quatre nouvelles aventures exceptionnelles dans la NHL aux Etats-Unis en récupérant son numéro 41 habituel. Le célèbre hockeyeur français a eu d’abord la grande chance de pouvoir évoluer pendant deux ans avec les Golden Knights de Vegas. Ce fut l’occasion pour le Tricolore de participer pour la première fois de sa vie à un grand événement : la série finale de la Coupe Stanley qui fut malheureusement remportée par les Capitals de Washington (4 matches à 1).
Pour l’anecdote, le Tricolore, qui était alors le deuxième français à disputer une « ronde finale » pour le titre après Cristobal Huet (2010), a découvert une chose totalement inattendue après son passage dans la cité des anges. Car pour immortaliser la performance des Golden Knights, finalistes de la Coupe Stanley dès leur première saison, un promoteur immobilier local a utilisé les noms des 22 hockeyeurs finalistes pour baptisé toutes les allées d’un nouveau quartier de Las Vegas. Du coup, il existe désormais une rue « Pierre-Edouard » ! « Ils auraient pu prendre mon nom plutôt que mes deux prénoms, a ironisé Bellemare. C’est incroyable. D’habitude, le nom des rues est attribué à des personnes qui ont fait des trucs pour l’humanité… » Mais son plus grand bonheur, il le vécut avec sa femme Hannah qui donna naissance à son premier enfant, son fils Léandre.
Au cours de ses deux saisons passées avec Las Vegas, Pierre-Edouard Bellemare disputa au total 72 matches (2017-2018) et 76 matches (2018-2019).

Après cet épisode épique, il passa également deux nouvelles saisons dans le grand circuit nord américain en défendant cette fois les couleurs du Colorado Avalanche (2019 à 2021) toujours avec son numéro fétiche 41 qui lui porta chance puisque sa famille s’est agrandie avec la naissance de son deuxième enfant, sa fille Lilia Rose. Sur le plan sportif l’occasion pour Pierre-Edouard Bellemare d’atteindre le chiffre symbolique de 500 matches disputés dans la NHL le 1er mai 2021, une victoire de 4-3 de l'Avalanche contre les Sharks de San Jose, devenant ainsi le troisième joueur d'origine française à franchir ce cap, rejoignant Antoine Roussel (544) et Paul MacLean (719) qui est né en France considéré toutefois comme canadien de formation. Mais notre Tricolore ne se doutait pas encore qu’après son départ du club de la ville de Denver, ce transfert allait lui causer une terrible désillusion en le privant pour la seconde fois de son grand rêve sportif à savoir gagner la Coupe Stanley.
Au cours de ses deux saisons passées avec Colorado, Pierre-Edouard Bellemare disputa au total 69 matches (2019-2020) et 53 matches (2020-2021).

 
UNE SECONDE SÉRIE FINALE EN NHL


En effet, celui que l’on surnomme familièrement « Pi-Ed » joua à nouveau deux saisons dans la NHL en portant une fois encore le maillot 41, mais avec une grosse écurie, celle de Tampa Bay Lightning (2021 à 2023) qui était rien moins que double champion en titre. A cette occasion, Pierre-Edouard Bellemare marquera encore l’histoire du hockey sur glace français à deux reprises. D’abord en étant le premier français à remporter le « Trophée des Présidents », récompensant la meilleure équipe de saison régulière en NHL. Ensuite, en disputant en 2022, pour la deuxième fois de sa carrière, la série finale de la Coupe Stanley malgré une blessure à un genou.
« Pour une grande victoire, il y a toujours des sacrifices à faire : le corps, le mental, la famille, dit-il. En Suède, j'ai joué en étant blessé, à Rouen aussi. Mais ça ne me dérange pas. Je n'ai pas peur de prendre des coups ». Malheureusement, le trophée suprême, à savoir la Coupe Stanley, lui échappa à nouveau puisque c’est son ancienne équipe, devenue adversaire, celle de l’Avalanche du Colorado, qui s’imposa dans la série finale (4 matches à 2).
Au cours de ses deux saisons passées avec Tampa Bay, Pierre-Edouard Bellemare disputa au total 80 matches (2021-2022) et encore 73 (2022-2023).


LE CHOC DU DÉPART DE SA MÈRE


La dernière saison avec le Tampa Bay Lightning sera très difficile pour Pierre-Edouard Bellemare comme l’a raconté le Journal de Montréal dans lequel on pouvait lire : « Avant le début des séries, le Français de 38 ans se retrouvait dans une période creuse de 20 rencontres sans un seul but. Jon Cooper l’avait également rayé de la formation à sept reprises en fin de saison. Bellemare a confié qu’il avait connu une année difficile. « C’était très, très dur. J’ai vécu le départ de ma maman. J’avais aussi enduré une blessure à la fin de la dernière saison et j’ai subi une opération. J’ai traversé une longue route pour me remettre dans le bon sens. J’avais hâte de rentrer en séries pour tourner une page. »
Le journal du Québec relata en détail cette période très douloureuse pour le célèbre hockeyeur français en expliquant : « Au mois de janvier 2023, Bellemare a vécu le deuil de sa mère Frédérique. En rémission d’un cancer du sein, elle a appris au mois d’octobre que son cancer était de retour, s’attaquant maintenant à son foie et à ses poumons. Elle a succombé à cette terrible maladie quelques mois plus tard. Quand il a déjoué Samsonov dans les premières secondes du premier match, le centre du Lightning n’a pas lancé un regard vers le ciel, comme il l’avait fait le 28 janvier en marquant contre les Kings à Los Angeles quelques jours après la perte de sa mère. « Non, je n’ai pas essayé d’y penser, a-t-il répliqué. Avec le deuil, il y a des hauts et des bas. Des fois, tu y penses et tu as des ailes qui te poussent. Mais d’autres fois, tu y penses et ça te place six pieds sous terre. Je veux y penser dans les bons moments. Le hockey m’aide à me concentrer. Quand je suis chez moi à la maison, je peux me tourner vers ma femme et mes enfants. Le décès de ma maman est encore frais dans mon esprit. »
Le chroniqueur du Journal de Montréal, Jean-François Chaumont, avait conclu son article sur l’international tricolore en disant : « Candidat du Lightning pour le trophée Bill-Masterton, qui couronne le joueur le plus persévérant, Bellemare avait parlé avec beaucoup d’émotions de sa mère dans une interview au Tampa Bay Times au début du mois d’avril. « Ma mère était un roc pour moi et mes quatre frères et sœurs. Elle s’est occupée seule de sa famille. Je lui dois ma carrière. C’est elle qui m’a enseigné toutes les valeurs importantes dans la vie comme dans le sport. ». Avec 608 matches (record porté désormais à 700) Pierre-Edouard Bellemare devenait l’an passé le joueur originaire de la France avec le plus de matches dans l’histoire, devançant Antoine Roussel. « Ce n’est pas normal, avait-il mentionné. Je suis ici, mais je ne devrais pas y être quand tu regardes mon passé. Quand tu penses à mon enfance et toutes les difficultés rencontrées, je ne devrais pas y être. Mais c’est grâce à ma maman. »

 
SA DERNIÈRE SAISON DANS LA NHL ?


Enfin, il signa au début de la saison actuelle (2023-2024) un contrat avec le nouveau le club de Seattle Kraken qui est devenu récemment la 32e franchise de la NHL. C’est sous ce maillot original (Le logo est un « S » en forme de tentacule avec un œil rouge féroce intégré) avec le numéro 41 habituel que Pierre-Edouard Bellemare, malgré une fracture à une jambe qui l’a éloigné momentanément du jeu, a réussi à atteindre le total symbolique de 700 matches dans la NHL. L’incident eut lieu lors d’une rencontre face au Minnesota Wild. Il a donc achevé la saison avec 40 matches, quatre buts et sept points.
A noter que pendant cette période inespérée de dix ans passés au total dans le circuit professionnel nord-américain de la NHL, le hockeyeur international français a comptabilisé dans ses statistiques 138 points dont 64 buts et 74 assistances. D’autre part, en signant des contrats avec cinq clubs différents, Pierre-Edouard Bellemare a cumulé la somme globale de 11 300 000 dollars en salaires.


SON EXEMPLARITÉ FAIT L’UNANIMITÉ


Dans le site internet officiel de la NHL on peut lire à son sujet : « L’éthique de travail et le caractère du vétéran du Kraken lui ont permis de connaître une improbable carrière dans la NHL. « Honnêtement, je ne pensais même pas que j’allais jouer un match à mon arrivée dans la Ligue, a raconté Bellemare. Je me souviens de m’être dit que j’avais plus de hockey derrière moi que devant. J’en suis fier, mais c’est quelque peu surréel parce que je suis un joueur de hockey français, a ajouté Bellemare. Je ne suis pas un Québécois, mais bien un Français ! Toute ma vie, on m’a dit que c’était impossible de simplement faire le saut dans cette ligue. J’ai toujours dit à ma mère que le jour où je cesserais d’apprendre serait le jour où je cesserais de jouer, a-t-il affirmé. J’apprends encore, donc je ne sais pas pourquoi j’arrêterais parce que je me sens en pleine forme. À moins que les équipes ne veuillent pas de moi, mais ce n’est pas le cas jusqu’à maintenant, et j’espère que ça n’arrivera pas. »
En effet, rien ne dit à l’heure qu’il est que Pierre-Edouard Bellemare, qui fêtera ses 40 ans l’année prochaine, le 6 mars 2025, ne continuera pas à évoluer encore une saison dans le circuit pourtant très exigeant de la NHL ce qui augmenterait une fois de plus l’admiration que j’ai pour ce joueur depuis ses débuts dans ma ville natale de Montpellier.

 
UNIQUE DÉTENTEUR D’UN TROPHÉE TRÈS RARE


Au sujet de Pierre-Edouard Bellemare, un événement particulier le concernant est passé un peu trop inaperçu lors de la promotion 2017 du Temple de la Renommée de la FFHG que j’ai eu l’honneur de présenter. En effet, le célèbre international tricolore a remporté à cette occasion le Trophée « Cristobal Huet » créé en 2011 et qui est remis que très exceptionnellement puisque le nom de Pierre-Edouard Bellemare reste le seul avoir été honoré jusqu’à ce jour ! Désirant mettre valeur l’altruisme exemplaire dont Cristobal Huet a fait preuve tout au long de sa carrière, la FFHG récompense désormais, à travers cette distinction éponyme, une personne méritante du hockey sur glace français pour ses qualités à la fois sportives et humaines. Comme je l’ai mentionné à cette occasion, qui d’autre pouvait prétendre à cet honneur unique que Pierre-Edouard Bellemare ? D’autant que ce dernier, dont l’altruisme n’est plus à prouver, a accepté de devenir le parrain de l’équipe de France de para-hockey.

Dans le Journal de Montréal, il déclara un jour : « Je dédie mes résultats en NHL à tous les Français qui me suivent car dans mon pays ce n’est pas banal du tout ! Je fais ça pour tous les enfants qui, comme moi, ont grandi dans un pays où le hockey n’est pas très connu et où tu dois te battre pour atteindre ton but. Quant à l’équipe de France, elle fait partie de ma famille. Je suis toujours très fier de porter le maillot tricolore même si je n’ai pas eu parfois l’opportunité de pouvoir répondre favorablement à toutes les sélections. »
Avec un total dans sa carrière à ce jour de onze Championnats du monde senior et quatre Mondiaux juniors (Deux en U18 et deux en U20), Pierre-Edouard Bellemare, qui fut capitaine de l’équipe de France junior des moins de vingt ans, possède un incroyable palmarès sportif qui force le respect. Je rappelle une anecdote qui m’a marqué : lors du Mondial U20, organisé au mois de décembre 2004 à Sheffield au Royaume-Uni, il a marqué cinq buts en cinq matches !

 
DAVE HENDERSON : « JE SUIS ADMIRATIF »


La carrière en équipe de France senior de Pierre-Edouard Bellemare a débuté avec les Championnats du monde de Prague en 2004 alors que la France fut reléguée malheureusement provisoirement en Division 1. Malgré ce souvenir sportif assez pénible, ce fut le départ d’un long mandat très positif pour Pierre-Edouard Bellemare sous la direction de l’ancien entraîneur national Dave Henderson qui venait de remplacer le finlandais Heikki Leime. Le nouveau coach franco-canadien a donc pu suivre la quasi-totalité des évolutions du célèbre joueur sous le maillot des Bleus pendant plus de dix ans, ce qui le rend le plus légitime pour analyser et expliquer les grandes qualités du vétéran tricolore devenu l’âme des Bleus.
« Pierre-Edouard a une très grande force de caractère, dit Henderson. Lors de son séjour en Suède ce ne fut pas facile pour lui, mais il s’est battu pour y arriver. Dans la NHL, il a eu le même comportement combatif pour gagner là encore sa place. C’est un joueur assez complet qui a désormais un rôle défensif. En équipe de France sa tâche avec moi était le jeu de puissance. Son rôle était aussi de tuer les punitions. Dans toutes les situations, il était polyvalent, il pouvait jouer dans tous les schémas. Je pouvais lui faire toujours confiance. Quand tu l’avais sur la glace, le travail était toujours bien fait. Il a débuté sur la quatrième ligne de l’équipe de France puis, avec l’expérience, il a grimpé dans la hiérarchie. C’est devenu un joueur clé de l’équipe de nationale dès son séjour en Suède. Il a un esprit de groupe et d’équipe pendant le jeu qui sont un atout important. J’espère qui pourra aider à nouveau la sélection tricolore à Ostrava pour rester dans l’élite mondiale. Si je devais résumer en une phrase son profil, Pierre-Edouard Bellemare est un travailleur toujours prêt à faire un sacrifice. C’est un joueur très humble qui est très apprécié par tous ses coéquipiers. N’oublions pas aussi, comme tu l’as rappelé, qu’il a disputé quand même à deux reprises la série finale dans la NHL, en 2018 avec Las Vegas et avec Tampa Bay en 2022. Même s’il n’a pas pu remporter la Coupe Stanley comme ce fut le cas de Cristobal Huet, cela mérite un grand respect. Je suis vraiment admiratif ! »

 




Depuis plus de quarante ans Tristan Alric a été l’acteur et le témoin privilégié de l’évolution du hockey sur glace en France. D’abord comme joueur puis comme arbitre. Ensuite, en devenant le journaliste spécialiste du hockey sur glace dans le quotidien sportif L’Equipe pendant plus de vingt ans. Auteur de nombreux livres et d’une récente encyclopédie qui font référence, Tristan Alric a marqué également l’histoire du hockey français en étant le créateur de la Coupe Magnus et des divers trophées individuels. Avec un tel parcours, il est donc bien placé pour avoir une analyse pertinente sur notre sport favori. Le site Hockey Hebdo est donc heureux de lui permettre de s’exprimer régulièrement dans cette rubrique.
 
 


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